Premier essai, premier succès. Il n'aurait pas fallu beaucoup au jeune réalisateur Kamel Iaïche pour réussir son entrée dans l'univers tumultueux du septième art. Pari certes difficile mais gagné haut la main comme en témoigne cette première grosse production de la nouvelle année, Mista, présentée, hier, en avant-première, à la salle Ibn Zeydoun de Riad el-Feth à Alger, dont on salue à la fois l'envergure esthétique et l'étendue dramatique du scénario. Film costaud par son casting (Dahmane Aidrous, Mourad Oudjit, Ahmed Benaïssa, Nadia Talbi...) et par ses soutiens matériels (ministère de la Culture, Agence algérienne pour le rayonnement culturel, Fdatic), il évoque, dans une longue odyssée narrative fidèle aux films réalistes dont se revendique le réalisateur, la vie de Mourad (Dahmane Aidrous), « un homme vivant dans un quartier populaire durant les années quatre-vingt-dix, rattrapé par le destin à l'aube de ses cinquante ans. Livré depuis quelques années à la monotonie de son quotidien, sa vie est brusquement bouleversée par la rencontre d'un jeune homme qu'il a sauvé de la noyade. Grâce ou à cause de ce concours de circonstance, Mourad se retrouve engagé dans une aventure qui lui permet de réaliser un vieux rêve de jeunesse : devenir acteur de théâtre. Mourad tente de mener une vie décente et vivre sa passion, même si l'une et l'autre sont souvent compromises par le spectre de la menace terroriste qui sans être visible demeure néanmoins omniprésente ». Une aventure tragique truffée de symboles mettant en lumière, via un scénario subtile et concis, l'inépuisable guerre opposant le terrorisme islamiste à l'art. Loin des « The end » flagorneurs, le cinéaste choisit la tragédie pour clore sa première œuvre, en décrétant la « victoire » de l'extrémisme. « Le terrorisme est toujours présent tant en Algérie, dans le monde arabe qu'à travers les quatre coins de la planète. L'art n'a pas réussi à combattre la violence extrémiste », assène l'intrépide réalisateur qui ne cache son obédience dramatique (titulaire d'un diplôme d'études supérieures en art dramatique option critique de théâtre, il est aussi metteur en scène) qui a marqué de bout en bout ce film 100% algérien, que le public pourrait découvrir prochainement notamment dans la mythique Cinémathèque algérienne. Après Mista, Kamel Iaiche se lancerait dans la réalisation de son second film, Papillon, un court métrage produit également par l'AARC.