Dans la mythique salle de conférence de Club des Pins, le moment est investi d'une forte charge historique. Alger, la très chaleureuse et fraternelle capitale des « damnés de la terre», se devait de rassembler les «pères fondateurs», en témoins privilégiés, et les «enfants de la 1514» dans la quête commune d'un monde de liberté, de progrès, de justice sociale et de dignité humaine pleinement retrouvée. Dans l'Algérie novembrienne, porteuse de tant d'espérances, l'évocation de la 1514 égrène le cheminement du dur combat contre le colonialisme «sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations» frappé du sceau du verdict historique qualifiant le déni contre les droits humains et la volonté souveraine des peuples opprimés. Elle reste le butin de la lutte légitime pour l'indépendance et se conçoit en héritage lourd à porter. Le monde libre de la 1514, symbolisé par la présence imposante de l'Algérien Ahmed Ben Bella, du Zambien Kenneth Kaunda, du Sud-Africain Thabo M'beki et des figures marquantes de l'âge d'or, trouve son prolongement dans la communion et les retrouvailles avec les dignes héritiers des idéaux de Lumumba, de Nkrumah, de Cabral…Une juste reconnaissance du rôle essentiel dans l'histoire de la libération des peuples du joug colonial et l'émergence d'un ordre plus humain, plus juste et de paix. L'héritage, fort de la nouvelle majorité constitutive du système onusien, reste à parachever notamment dans les 16 territoires non autonomes privés de leur droit inaliénable à l'autodétermination. A l'heure de la mondialisation-globalisation, imprimant le chantage impérial et la pensée unique de l'ultra libéralisme ravageur, le défi impose la rédemption en toutes urgences du néo-Bandung pour le rétablissement des vérités historiques et la défense des valeurs humaines et démocratiques pour lesquelles le monde de la 1514 a existé. L'empire qui a changé de mains n'a pas pour autant changé de nature. De l'Irak de la balkanisation fatale, à l'Afghanistan passée à la trame de la «lutte contre le terrorisme international» de toutes les mystifications, le projet de liquidation des pôles de résistance et d'affaiblissement des Etats nationaux se reconnaît dans la vision discriminatoire et négatrice des droits nationaux de la «centralité» palestinienne et de «l'exemplarité» sahraouie voués à l'ostracisme de l'ONU et la loi du plus fort. A «voix forte et unie», l'Afrique de la renaissance et du Nepad est, à l'échelle du continent, le néo-Bandung de la communauté de destin en marche pour la préservation de l'héritage de la 1514 dans toutes ses manifestations : le droit à l'indépendance et à la souveraineté permanente sur les ressources et richesse nationales.