Pour sa troisième soirée, le Dimajazz nous a offert un concert passionnant et surprenant à la fois avec deux artistes uniques et au parcours atypique : Jamel Sabri et son groupe les Berbères, et la chanteuse américaine Martha High et son orchestre. Deux artistes qui dégageaient sur scène beaucoup d'énergie, d'engagement et d'émotion, offrant au public une soirée dansante riche en musicalité et en authenticité. Ainsi, c'est le leader du groupe les Berbères qui entrera le premier sur scène. Inimitable comme à son habitude, Jamel Sabri présentera un show théâtralisé et très rock n'roll. « Quand je suis sur scène, je danse comme un cobra, c'est plus fort que moi, je ne regarde pas le public, j'ai la sensation que je vole », a-t-il lancé au cours de sa conférence de presse. Le groupe d'Oum El Bouaghi proposa les titres de ses trois albums, mais le public n'a cessé de réclamer la fameuse Bachtoula. Et dès les premières notes, la salle s'enflamma dans une ambiance de folie, en même temps que résonnait la voix de Sabri. Le public a insisté à la fin du spectacle pour que Joe revienne sur scène et chante de nouveau Bachtoula. « Constantine a un merveilleux public, c'est un public qui connaît la musique. J'espère que nous avons été à la hauteur car ce festival est de grande qualité parce qu'il ramène des artistes professionnels de renommée internationale », a-t-il déclaré aux journalistes. Estimant que la musique chaoui n'existe plus, Jamel Sabri se considère comme un « petit artiste » très marginalisé par les responsables de la culture. Une marginalisation qui dure depuis une vingtaine d'années et qui l'empêche, selon lui, de pratiquer sa musique et son art, preuve s'il en est de son exclusion du festival de Timgad qui dure depuis 1997. « Pour moi, c'est insupportable de constater que je ne peux participer à ce festival qui se déroule chez moi. Parfois je me dis que ce pays ne veut pas de moi. Certains responsables prétendent que je suis imprévisible sur scène. C'est regrettable, parce que les artistes qui apportent une originalité sont systématiquement exclus. » Enfin, pour ses projets, Jamel Sabri nous annonce qu'il a l'intention de préparer un nouvel album. « Son enregistrement ne se fera sans doute pas à l'Est où je ne trouve pas d'écho. » Changement d'ambiance et de musique avec l'une des stars de cette quatorzième édition du festival, la chanteuse soul Martha High, ancienne choriste de James Brown. Six ans après sa venue au Dimajazz aux côtés du saxophoniste Macéo Parker, Martha High, 71 ans, n'a rien perdu de sa virtuosité, toujours aussi réjouissante et habitée par une intense énergie. Accompagnée de son orchestre et de deux choristes, elle fera une prestation sensationnelle, surfant tantôt sur la soul, tantôt sur des airs funk. Il faut saluer ses musiciens irréprochables du début jusqu'à la fin, et en totale symbiose avec leurs instruments (guitare, basse, saxophones et batterie). Martha High reste très fidèle à l'esprit de la soul music. Ses chansons, tirées principalement de ses albums W.O.M.A.N et Singing for the good times, parlent de la femme et de l'amour. « Les jeunes doivent connaître la soul music qui ne s'est jamais arrêtée. J'ai côtoyé les meilleurs artistes de la soul et du funk, et je voudrais partager cela avec le jeune public. Et c'est justement ce que j'aimerais toujours avoir, un public aussi merveilleux que celui de Constantine. Sur scène, j'étais très à l'aise pour m'exprimer et partager de la musique avec ces gens venus s'amuser et danser », a-t-elle confié lors de sa conférence de presse. Questionnée sur l'élection de Donald Trump, Martha High, très émue, nous dira : « J'ai peur et pour beaucoup de raisons. Après avoir eu un Président intelligent et qui a très bien représenté le pays, aujourd'hui nous avons un raciste à la place, un homme d'affaires qui n'aime pas les femmes et qui est plus préoccupé par la construction et la vente des buildings que par autre chose. »