Depuis le début de la crise financière aux Etats-Unis, le discours politique en dit toujours plus qu'il n'est fait réellement en matière de coercition contre les délits de gestion économique. On dénonce, se fâche, hausse le ton et oublie, comme si tout cela n'est fait que pour calmer une opinion américaine qu'on voudrait convaincre que tout est pris en charge et que le contribuable américain peut dormir sur ses lauriers tout en continuant de se solidariser avec l'effort national de redressement économique. Il n'y a pas mieux que la fraîcheur du cas d'American International Group (AIG) pour illustrer cette situation dont on peut dire qu'elle est un cas d'école, puisqu'elle mêle à la fois les questions de choix financiers et les questions éthiques. AIG a connu trois moments, ces derniers temps, qui ont structuré le temps du déclin et de la chute. Le premier moment a consisté dans le grand renflouement financier décidé sous Bush et où l'actuel secrétaire au Trésor, Tim Geithner a joué un rôle déterminant. Une décision qui aura coûté 173 milliards de dollars aux contribuables américains, qui n'aura finalement servi à rien et qui a conduit au deuxième moment, à savoir celui de la chute spectaculaire et l'entrée en liquidation d'une compagnie qui n'est rien d'autre que le fleuron mondial de l'assurance. Le troisième moment est celui de la révélation d'une indécence financière qui donne une idée du mode de gestion, par les magnats de la finance mondiale, des milliards qui circulent et qui sont ponctionnés, quelle que soit la situation, pour enrichir ceux qui font tourner la machine. Comment expliquer au contribuable américain, honnête et engagé pour le redressement de la situation économique de son pays, lui qui voit tomber, comme des mouches, des centaines de milliers de chômeurs, qu'il est logique et normal que les lois soient faites de manière à permettre à un cadre dirigeant d'une compagnie financière de recevoir des bonus se chiffrant en millions de dollars, quand par ailleurs on est en train de signer le certificat de décès de la compagnie en question ? La question autrement posée consiste à essayer de comprendre selon quelle logique on paye des primes aux cadres d'une compagnie qui vit sous la perfusion généreuse de l'argent du contribuable. L'équipe de Bush avait approuvé le projet de primes d'AIG et l'on comprend cela, tant il est vrai que l'ancienne équipe se disait franchement du bord des riches qui s'enrichissent aux dépens des moins riches. Mais on comprend moins que l'équipe d'Obama perde en chemin, dans le texte portant le plan de sauvetage, l'article qui préconise d'empêcher les «chasseurs de primes» de jouer aux Vampires par temps de disette. M.B.