Bechar Al-Assad, même s'il a annoncé des réformes politiques et promis une «liberté d'expression responsable», envoie pour la énième fois depuis le 15 mars, date du début de la protesta des troupes pour encercler les foyers de la contestation dans une trentaine de villes. Six personnes ont été tuées, hier, par des tirs des forces de sécurité dans deux opérations de perquisitions près d'Idleb (nord-ouest) à Qara, près de Damas, selon Rami Abdel Rahmane, le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme qui fait état de dizaines de blessés. Des chars et une trentaine de véhicules de transport de troupes ont pénétré, hier matin, dans la localité de Hit, à deux kilomètres de la frontière nord du Liban, selon la même source. Dire que le 17 août, Al-Assad s'était engagé de «cesser» toutes ses opérations militaires contre les opposants avec Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies qui lui a exigé la fin des «opérations militaires» et des «arrestations de masse» ! Comme pour éviter un «remake» du scénario libyen, la Russie qui a engagé un bras de fer avec les Occidentaux au Conseil de sécurité sur la Syrie et la Ligue arabe qui regrette son approche de la crise libyenne, s'activent. Moscou a envoyé hier Mikhaïl Bogdanov, le vice-ministre russe des Affaires étrangères chez Al Assad. Il serait porteur d'un message du président Dmitri Medvedev appelant à «un arrêt immédiat des violences d'où qu'elles viennent» et «une prise de mesures concrètes pour mettre en oeuvre les réformes annoncées». L'opposition, qui a élu hier, Burhane Ghalioun, professeur de sociologie politique à la Sorbonne, comme président du «Conseil national de transition», - une instance de 94 membres destinée à coordonner la lutte de l'opposition et à assurer la transition démocratique du pouvoir après le départ d'Al Assad- n'est pas omise. Elle est priée de ne pas se soustraire au dialogue.Al Assad, qui sait que le projet européen, présenté par la France, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et le Portugal et soutenu par les Etats-Unis, appelle à un gel de ses avoirs financiers, de ceux de son entourage et à un embargo sur les armes finira par être adopté, tout compte l'accord de principe pour un embargo du pétrole syrien par l'Union européenne écoutera t-il les «conseils» de Medvedev ? Après les pays du Golfe, l'Iran, la Turquie, les deux pays alliés dans la région, l'ont quasiment lâché. «Désormais, la situation en Syrie a atteint un tel niveau que tout est trop infime et trop tardif. Nous n'avons plus confiance», déclare le président turc Abdullah Gül en songeant probablement à la dernière réunion du Conseil des droits de l'homme de l'ONU qui a conclu que «les atrocités» commises par les forces de sécurité sur des civils pourraient relever de «crimes contre l'humanité». L'urgence à protéger les civils contre l'utilisation excessive de la force n'est-elle pas la cause de l'intervention militaire occidental en Libye ? C'est la conviction de la Ligue arabe. En chargeant M. Nabil El Arabi, son secrétaire général, de se rendre «en urgence» à Damas pour exposer au président El-Assad l'approche des pays membres de la Ligue pour une sortie de la crise, elle semble vouloir éviter une intervention étrangère. Pas spécialement sous la forme qu'on a vue en Libye.