Chiffres n Ils sont pas moins de 41 549 couples à avoir divorcé en 2009, soit 52%. Un taux qui témoigne d'une grave expansion du phénomène. Les affaires liées au divorce enregistrées ces dernières années ont, autant dire, dépassé toutes les prévisions. Les raisons religieuses, politiques, socioculturelles, économiques qui maintenaient autrefois les liens d'une union perdent de leur sens. Il s'agit d'un phénomène sociétal qui risque de bouleverser la structure de la famille algérienne et de la société tout entière. Les dernières statistiques du ministère de la Justice font état de 12 900 divorces prononcés à l'amiable, 20 134 divorces à la demande unilatérale de l'époux contre 4 650 à la demande de l'épouse, et 4 464 par «kholoô». Une réelle évolution dans les mœurs au vu des chiffres cités ci-dessus. Le «kholoô», un droit de divorce accordé à la femme où cette dernière peut racheter sa liberté sans avoir à présenter des preuves d'une quelconque maltraitance conjugale, est un procédé qui semble avoir la cote en Algérie. La valeur de l'indemnité compensatoire versée à l'époux dans ce cas est déterminée par le juge. Loin du cliché traditionnel, les femmes paraissent assumer aujourd'hui pleinement leurs choix, n'hésitant pas à crier haut et fort leur volonté de se séparer de leurs conjoints lorsque la vie de couple devient insupportable. De plus en plus affirmées, elles ne sont plus disposées à subir les abus de leurs belles-familles ou le machisme de leurs maris. Pourtant, non sans conséquence, cette détermination les conduira à faire face, une fois le divorce prononcé, au poids des traditions. En effet, les femmes divorcées se retrouvent, dans la majorité des cas, à vivre dans un climat de suspicion, livrées à une sorte d'interrogatoire social et familial. Sans compter l'image négative faite de sentiments de honte que leur divorce jette sur leurs sœurs célibataires ou globalement sur leurs familles. Une conception archaïque aux conséquences préjudiciables pour nombre d'entre elles, poussées ainsi à endosser seules la responsabilité de leur choix, même si le verdict est en leur faveur. Cela ne s'arrête pas là, notamment pour les mères de famille. «Ce phénomène en constante expansion, pose un réel problème aux mères de famille qui se voient livrées à elles-mêmes après le divorce. Le conjoint est certes tenu d'assurer un logement ou à défaut un loyer à la mère, bénéficiaire de la garde de ou des enfants. Mais le loyer réclamé n'excède pas les 6 000 DA, voire 4 000 DA par mois. Une somme qui ne peut en aucun cas garantir un logement décent à une mère et à ses enfants», déplore maître Seddat. Dans ce contexte, la femme est davantage affectée par, aussi bien, la rupture du lien conjugal que par les lois qui ne protègent pas toujours ses droits. En revanche, contrairement aux idées reçues, l'impact psychologique retentit de la même façon sur les deux conjoints. Dans notre société traditionaliste, l'homme divorcé paraît, pourtant, épargné par les retombées de la rupture du lien conjugal. En apparence seulement, car le chamboulement qui s'ensuit peut le faire plonger dans un état de saturation limite avec ce sentiment de devoir quitter une vie pour se jeter dans l'inconnu...