Résumé de la 3e partie n Ne retrouvant pas son chemin – les oiseaux ayant mangé les miettes qui'il avait semée –, le petit Poucet et ses frères arrivent dans la maison d'un ogre... «Il est fort possible, lui dit sa femme, que ce soit ce veau que je viens d'habiller (désosser et ficeler) que vous sentez». — Je sens la chair fraîche, te dis-je encore une fois, reprit l'ogre, en regardant sa femme de travers, et il y a ici quelque chose de louche. En disant ces mots, il se leva de table, et alla droit au lit. — Ah, dit-il, voilà donc comme tu veux me tromper, maudite femme ! Je ne sais à quoi il tient que je ne te mange aussi ; bien t'en prend d'être une vieille bête. Voilà du gibier qui me vient bien à propos pour régaler trois ogres de mes amis qui doivent me venir voir ces jours ici. Il les tira de dessous le lit l'un après l'autre. Ces pauvres enfants se mirent à genoux en lui demandant pardon ; mais ils étaient devant le plus cruel de tous les ogres, qui bien loin d'avoir de la pitié les dévorait déjà des yeux, et disait à sa femme que ce serait là de friands morceaux lorsqu'elle leur aurait fait une bonne sauce. Il alla prendre un grand couteau, et en approchant de ces pauvres enfants, il l'aiguisait sur une longue pierre qu'il tenait à sa main gauche. Il en avait déjà empoigné un, lorsque sa femme lui dit : — Que voulez-vous faire à l'heure qu'il est ? N'aurez-vous pas assez de temps demain matin ? — Tais-toi, reprit l'ogre, ils en seront plus mortifiés. — Mais vous avez encore là tant de viande, reprit sa femme, voilà un veau, deux moutons... ! — Tu as raison, dit l'ogre, donne-leur à souper afin qu'ils ne maigrissent pas, et va les mener coucher. La bonne femme fut ravie, et leur porta à souper, mais ils ne purent manger tant ils étaient saisis de peur. Quant à l'ogre, il se remit à boire, heureux d'avoir de quoi si bien régaler ses amis. Il but une douzaine de coupes, plus qu'à l'ordinaire, ce qui lui donna un peu mal à la tête, et l'obligea à aller se coucher. L'ogre avait sept filles qui n'étaient encore que des enfants. Ces petites ogresses avaient toutes le teint fort beau, parce qu'elles mangeaient de la chair fraîche comme leur père ; mais elles avaient de petits yeux gris et tout ronds, le nez crochu et une fort grande bouche avec de longues dents fort aiguës et espacées. Elles n'étaient pas encore très méchantes ; mais elles promettaient beaucoup, car elles mordaient déjà les petits enfants pour en sucer le sang. On les avait fait coucher de bonne heure, et elles étaient toutes sept dans un grand lit, ayant chacune une couronne d'or sur la tête. Il y avait dans la même chambre un autre lit de la même grandeur ; ce fut dans ce lit que la femme de l'ogre mit à coucher les sept petits garçons ; après quoi elle alla se coucher auprès de son mari. Le petit Poucet qui avait remarqué que les filles de l'ogre avaient des couronnes d'or sur la tête, et qui craignait qu'il ne prit à l'ogre quelque remords de ne les avoir pas égorgés dès le soir même, se leva vers le milieu de la nuit, et prenant les bonnets de ses frères et le sien, il alla tout doucement les mettre sur la tête des sept filles de l'ogre, après leur avoir ôté leur couronne d'or qu'il mit sur la tête de ses frères et sur la sienne, afin que l'ogre les prît pour ses filles, et ses filles pour les garçons qu'il voulait égorger. (à suivre...)