Projet n Les martyrs reviennent cette semaine, la nouvelle du regretté Tahar Ouettar, disparu cet été, sera prochainement portée à l'écran. L'adaptation de cette nouvelle sera menée par le Syrien Aymen Zidane. Le film dont le premier tour de manivelle sera incessamment donné, aura pour titre ‘Les revenants'. Publiée en 1974 à Bagdad, puis rééditée en 1980 à Alger, Les martyrs reviennent cette semaine se situe à la limite du fantastique, mais au cœur même du débat de société. L'histoire commence par l'annonce du retour des martyrs de la Guerre de libération nationale. Un homme voit en rêve le retour de tous ceux qui sont morts au combat. À leur tête, il reconnaît son propre fils. Il sort de son sommeil et, porté par ce bonheur inespéré, part annoncer la nouvelle à tout le village. Le rêve agit alors comme un révélateur et débusque, un à un, les mensonges érigés en système de pensée et de pouvoir. Ce rêve de fou que personne ne prend au sérieux, finit pourtant par réveiller les démons de l'invraisemblable. Et chacun de se positionner alors par rapport à cet événement devenu probable au regard des consciences. Une véritable mise à nu de la société algérienne confrontée à cette terrible dépossession : à l'immense espoir né de l'indépendance, fait suite l'étouffement des libertés. A noter que cette nouvelle qui a été adaptée au théâtre par M'hamed Benguettaf et mise en scène par Ayad Ziani Cherif, a été jouée, une première fois, lors de l'ouverture du 3e Festival national du théâtre professionnel en 1987, et, en 2003, dans le cadre de «Djazaïr 2003, l'année de l'Algérie en France». Cette adaptation a, pour rappel, largement permis de populariser le texte de Tahar Ouettar et d'accroître la notoriété de l'auteur. Il est bon de rappeler que l'adaptation théâtrale de cette nouvelle a été récompensée, en 1988, par le Grand Prix des Journées théâtrales de Carthage. Le succès de la nouvelle dans sa version théâtrale tient du fait que le metteur en scène a eu recours aux formes d'expression populaires pratiquées dans la société traditionnelle, à savoir les gouals ou meddahs qui écumaient les marchés et les places publiques, et les halqas, ces récits sous forme de chant. Cette démarche créative a, en outre, le mérite d'aborder, mais aussi d'actualiser la question encore sensible de la mémoire dans une société marquée par de nombreuses épreuves. C'est dans cet état d'esprit que le Syrien Aymen Zidane tentera de développer son film, à savoir proposer des fresques de la société arabe dans ses aspects les plus significatifs et les plus larges, les plus divergents comme les plus contradictoires et ce, tout en se préservant l'essence même de la nouvelle, c'est-à-dire son âme.