Depuis 2008, le défunt écrivain ne cessait de faire des allers-retours entre l'Algérie et la France pour soigner une incurable cirrhose. Affaibli depuis cette date, Tahar Ouettar était quand même visible lors du Salon national du livre qui s'est déroulé en avril dernier aux Pins Maritimes et lors duquel le syndicat national des éditeurs du livre (SNEL) lui a rendu un vibrant hommage dés son retour de la capitale parisienne où il était en convalescence. C'est d'ailleurs, le président de la République lui-même qui a donné des instructions pour que l'auteur de "AS " soit pris en charge à l'étranger, des instructions appliquées à la lettre par le ministère de la Culture, qui a d'ailleurs délégué le patron de l'ONCI pour assister le défunt dans tous ses déplacements. Trépassé à l'âge de 74 ans d'une maladie longue et lourde, Tahar Ouettar n'a jamais cessé d'apparaître dans les rendez-vous officiels eurent-ils un rapport infime avec la littérature. Arabophone et profondément croyant, il y a toujours eu des frictions entre lui et certains auteurs francophones qui lui reprochaient ses accointances avec les pouvoirs en place. N'avait-il pas dit lors d'une conférence que Tahar Djaout était une perte pour la France ? C'était en 2007 et certains intellectuels l'on très mal pris. Tout de même, avec Benhadouga, Tahar Ouettar serait l'un des rares écrivains algériens d'expression arabe de la période coloniale. Ses récits comme "Ezilzel" (Le séisme, Sned 1974), sont même enseignés dans les universités de langue algérienne. Ce roman porte d'ailleurs, le titre d'un des verset coraniques en rapport avec le séisme et qui est intégralement reproduit dans ce texte. Naissance Tahar Ouettar est né à Sedrata un petit village de l'Est algérien en 1936. Il disait d'ailleurs, à ce propos, comme dans une oeuvre biographique : " Je suis né dans un douar de la compagne, d'une famille qui comptait quatre garçons, mon père en a mis deux à l'école de langue française, deux à l'école en langue arabe. J'ai vécu dans la pureté, de l'existence, nourri du spectacle des collines sur lesquelles tombait le crépuscule, jouant de la flûte derrière les brebis et les oies. J'ai été témoin de l'herbisme. Ma mère accouchant toute seule, ma mère encore montant la garde la nuit sur le toit. J'ai saisi le sérieux de la nature et des hommes qui m'entouraient. Dans le Coran que j'apprenais par cœur, j'ai reconnu l'éloquence et la beauté. Ceci se passait avant la Révolution ; depuis d'autres facteurs sont venus enrichir ma personnalité ". Il s'installe après à M'daourouch , où il a vécu la meilleure période de son parcours. " Là, il a découvert une autre société, des vêtements et une langue étranges et une autre façon de vivre. Il se mit à méditer tout en apprenant ou en enseignant le Saint Coran ". Il rejoint ensuite l'école de l'association des Ulémas qui a ouvert en 1950, et il se distingue parmi les meilleurs élèves. Après l'école de cette période, les études le conduisent successivement à l'Institut Ben Badis de Constantine puis à la Zitouna de Tunis (début 1954) . Durant les années 50, il adhère au socialisme en lisant les récits épiques. Contribution dans le théâtre et le cinéma Fin des années 80, au moment où notre théâtre connaissait son apogée, l'une des œuvres devenue phare de Tahar Ouettar a été adaptée au théâtre : Il s'agit de "Les martyres reviennent cette semaine", une pièce montée par Ziani Cherif Ayad avec Sonia et qui a tourné, des années durant, dans nos salles en raflant même un prix au festival de Carthage. Pour le cinéma, il y a eu l'adaptation de Noua, inspirée de Dukhan fi Qalbi (fumée dans mon cœur)qui fut adaptée à un film produit par la télévision algérienne et a reçu plusieurs prix. Sa pièce théâtrale Al Harib, s'est produite au Maroc et en Tunisie. Parmi les plus connues de ses œuvres, il y a " Noces de mulet " Roman, (Beyrouth 1980), Expérience amoureuse - Roman Alger 1989, Aimer et mourir à l'ère harrachite - Roman - Alger 1978, La Bougie et les cavernes, Roman Alger 1995 etc . Son parcours d'écrivain a commencé en 1955, avec la publication de nouvelles dans la presse tunisienne. Son premier roman "L'as", qui a connu un immense succès, est paru en 1971, inaugurant ainsi une série d'ouvrages littéraires. Il a présidé depuis 1989 l'association culturelle Al-Jahidhya et a continué à le faire malgré la détérioration de son état de santé, ces dernières années. Ancien directeur général de la Radio nationale, le défunt a été également journaliste dans plusieurs journaux d'expression arabe comme Echaib. En 2005, il reçoit le prix Sharjah de la culture arabe par le comité exécutif de l'Unesco qui correspond à pas moins de 25 000 dollars. Il repose depuis vendredi dernier au cimetière d'El Alia.