Initiative n Le souci majeur de cette interprète de musiques et de chansons classiques algériennes est naturellement, et de toute évidence, la préservation de ce legs musical. Le travail de sauvegarde de ce patrimoine (arabo-andalou) est entamé dans les années 1990 par l'enregistrement d'un album et se poursuit jusqu'à aujourd'hui. Ainsi, Beihdja Rahal en est à son 20e album. Celui-ci – une nouba exécutée sur le mode dil – marque un autre tournant dans sa carrière. «Cet enregistrement s'inscrit dans le cadre de la continuité du travail de sauvegarde et de préservation du patrimoine musical andalou que j'ai entamé il y a plus d'une dizaine d'années», nous dit-elle, et d'ajouter : «Je voulais, au départ, enregistrer deux ou trois noubas, seulement pour le plaisir de le faire, et, ensuite, vu l'accueil du public, j'ai tenu à renouveler l'expérience à chaque fois que l'occasion s'est présentée à moi.»C'est alors que Beihdja Rahal s'est inscrite dans cette ligne, et aussitôt s'est assigné la mission d'entretenir et de pérenniser le patrimoine andalou. Elle a décidé de continuer, tout en tenant à partager sa sensibilité, sa passion et ses connaissances avec son public. «Je ne prétends pas connaître tout le patrimoine, mais j'essaie d'enregistrer tout ce qui est en ma possession», dit-elle, et de rétorquer : «Je me consacre totalement à cette passion que j'essaie de partager avec le public. Je pense que c'est aussi un travail pédagogique, car en éditant mes albums, j'explique et je classe des pièces et des modes, pour que ce ne soit plus un domaine réservé aux initiés.» Et de préciser : «Je n'apporte rien de nouveau, je ne crée pas et je n'innove pas, je reste dans la tradition pure d'interprétation, et c'est d'ailleurs mon but.»Ainsi, Beihdja Rahal s'emploie à rester dans l'authenticité, à interpréter les pièces telles qu'elles sont classées, toutefois elle y apporte sa touche personnelle et sa sensibilité pour leur redonner vitalité et couleur. Par ailleurs, ce qui rend Beihdja Rahal particulière, différente des autres, c'est qu'elle fait elle-même la promotion de son travail. «C'est moi-même qui fais la promotion de ma carrière artistique», confie-t-elle, et de s'étaler : «J'ai contacté les musiciens, j'ai repéré un studio d'enregistrement, j'ai réussi à intéresser les sponsors, je contacte les médias, j'effectue des séances photos. Puis, je fais la promotion de mon album, afin qu'il soit distribué un peu partout.»Cela revient à dire qu'elle gère personnellement sa carrière artistique. «C'est moi qui assure la promotion de ma carrière artistique», affirme-t-elle, et de souligner : «J'ai appris à gérer ma carrière depuis que je suis établie en France. Cela a été une expérience enrichissante pour moi.» Beihdja Rahal, pour une femme, se révèle une artiste à part, unique et exceptionnelle. Elle est son manager, son attaché de presse… Elle fait tout pour promouvoir sa mission, faire connaître son travail. C'est une artiste qui persévère dans chaque expérience menée, dans chaque aventure entamée. C'est une persévérante, qui va de l'avant, elle ne baisse jamais les bras, sinon elle n'en serait pas à son 20e album. Beihdja Rahal, qui se soucie très fort du devenir du patrimoine arabo-andalou, se consacre à l'écriture, puisqu'elle vient de coéditer des ouvrages relatifs à la musique arabo-andalouse. On peut citer La plume, la voix et le plectre paru en décembre 2008 aux éditions Barzakh, La joie des âmes dans la splendeur des paradis andalous, édité en novembre 2010 par l'Anep. Cet ouvrage, très vite été écoulé, sera réédité. Beihdja Rahal – qui s'occupe de la partie musicale – et Saâdane Benbabaâli – qui prend en charge le côté littéraire – ont aussitôt pensé à un deuxième opus, qui, lui aussi, a bien marché. Car «le public est en manque d'ouvrages de ce genre», dit-elle, et de préciser : «Il apprécie la musique andalouse, mais il n'a pas beaucoup d'éléments pour pénétrer ce monde merveilleux de sa poésie dans toutes les formes, de son histoire…» Selon Beihdja Rahal, ce travail d'écriture consiste à apporter des éclairages, des explications quant à la poésie et à la musique andalouse. Et d'ajouter : «Nous voulons que le public comprenne et pas seulement qu'il écoute. Après la musique, nous voulons qu'il découvre la poésie chantée, son origine, les auteurs qui l'ont conçue, qui n'étaient pas seulement poètes mais aussi philosophes, leur faire découvrir un autre univers de beauté.»