Mode n Si la stratégie des Etats-Unis repose pour l'essentiel sur une politique bien affichée de la canonnière qui a bien souvent porté ses fruits, la tactique utilisée diffère d'un objectif à l'autre. S'agissant d'individus bien ciblés, les Américains recourent généralement à l'enlèvement à l'extérieur de leur territoire, les hommes de la CIA étant parfaitement entraînés à ce type d'opération. Mais lorsque ces individus sont un danger pour leur sécurité, comme ce fut le cas de Ben Laden, ils foncent carrément dans le tas sans se préoccuper des complications politiques et diplomatiques que pourrait soulever leur intrusion. A l'insu des Pakistanais, qui ont été ridiculisés dans cette affaire, un commando super-entraîné et hyper-armé investira le domicile du chef d'Al-Qaîda, abattra sa cible, mettra la main sur tous les documents et les disques durs trouvés sur les lieux et retournera par hélicoptère vers son port d'attache, un porte-avions qui l'attendait au large. Cette stratégie de la canonnière qui est une constante pour les Américains change de tactique, dès lors que des pays se placent ouvertement en travers de leurs intérêts. C'est le cas de l'Irak. Pour punir Saddam pour avoir envahi, le Koweït qu'il considère comme sa chasse gardée eu égard aux énormes volumes de pétrole qu'il recèle, Bush père bombarde Bagdad, détruit ses principales infrastructures et soumet l'Irak, par le biais des Nations unies, à un embargo sans pitié. Le peuple de Babylone mourra à petit feu. Son pétrole est échangé contre de la nourriture. Les magasins sont vides. La pénurie est partout. L'aéroport est quasiment fermé. Son espace aérien est contrôlé. Et comme les Irakiens résistent et ne plient pas, Bush fils, cette fois, en remet une couche. Sous le prétexte que Bagdad fabriquerait en secret des armes de destruction massive, une accusation mensongère dans laquelle toute l'Europe marchera sauf la France de Chirac, les Américains occupent tout l'Irak assistés pour la galerie par des Anglais, des Italiens et des Espagnols et font pendre Saddam. Du reste, ils n'ont pas encore quitté le pays, pas plus qu'ils ne quitteront l'Afghanistan où ils mènent depuis des années une guerre sans merci contre les talibans. Cette politique de la canonnière qui consiste à traquer et à donner la chasse à leurs ennemis partout où ils se trouvent, n'est pas sans conséquence pour la stabilité du monde. La guerre contre l'Irak a monté les sunnites contre les chiites, les kurdes contre le pouvoir central, imposé aux Turcs de surveiller davantage leurs frontières. La guerre contre l'Afghanistan a débordé sur le Pakistan et obligé l'Inde à faire preuve de plus de vigilance.