Résumé de la 5e partie n Le 3e témoin, un expert, ne peut que constater que Françoise Bruckenau n'a pas freiné avant l'accident... «Bien sûr puisqu'elle a été surprise !... s'exclame la défense. — Bien sûr puisqu'elle voulait le tuer ! «s'exclame le procureur. Et il demande à l'expert : «Est-ce que l'accusée a accéléré ? — Je n'ai aucun moyen technique de répondre à votre question. Mais les témoignages que j'ai pu recueillir semblent indiquer qu'elle n'a pas accéléré.» Après l'audition de différents autres témoins, il devient évident que le président, le public et probablement les jurés souhaitent une issue heureuse à ce procès. Manifestement, il leur répugne de séparer de nouveau et sans doute définitivement ces deux partenaires. En outre, après ce qui s'est passé dans ce ménage on peut comprendre que Françoise ait eu un mouvement de colère. Et tous semblent apprécier la volonté de cette frêle jeune femme et l'estiment capable de réaliser son projet de reprendre la vie en commun. La personnalité de Françoise est ainsi faite qu'elle a tendance à agir impulsivement, à réfléchir ensuite aux conséquences, quitte à en rester effarée. Et puis il y a leur enfant. Mais le problème est ardu, voire insoluble juridiquement car il ne fait aucun doute qu'elle a jeté sa voiture volontairement sur son amant. Or la loi est ainsi rédigée qu'en reconnaissant ce fait indéniable, les jurés la condamnent automatiquement à une peine très lourde, puisqu'il s'agit dans ce cas d'une tentative de meurtre. La seule possibilité serait de démontrer que, bien qu'ayant précipité sa voiture vers son amant, elle n'avait pas l'intention de le tuer. En réalité, tout dépend du procureur. Aussi lorsqu'il se lève pour son réquisitoire, on entendrait une mouche voler. «Monsieur le président, puis-je poser une question à l'accusée et au témoin principal ? — Faites. — Accusée, au cas où vous seriez libérée, en reprenant la vie en commun avec Erni Schmidt comme vous en avez manifesté l'intention, est-ce que vous vous marierez ? J'entends : légalement ?» Surprise, l'accusée regarde son défenseur qui, tout aussi éberlué, lui recommande de répondre par l'affirmative. «Oui, dit Françoise. — Erni Schmidt, demande le procureur, êtes-vous d'accord pour épouser Françoise Bruckenau ? — Oui. — Bien... Considérant que l'accusée n'augmenta pas de vitesse lorsqu'elle aperçut Erni Schmidt dans la rue, j'en déduis qu'elle ne cherchait pas à le tuer. Celui qui veut tuer accélère, surtout s'il ne dispose que d'une Fiat 500. Dans ces conditions, ne voulant pas briser un couple et nuire à l'avenir d'un enfant, je requiers donc le minimum de la peine prévue pour «blessures graves», soit un an de prison avec sursis et période de probation, pour permettre le mariage. Pierre Bellemare