Résumé de la 1re partie n Bien qu'ayant tenté de tuer son amant Erni Schmidt, Françoise Bruckenau dit s'être réconciliée avec lui... Au tour du procureur d'intervenir avec hargne : «Il s'agissait plus de passion que de bonheur si je comprends bien. Pourtant je croyais qu'on vivait ensemble pour essayer de rendre son partenaire heureux. Mais ça doit être différent aujourd'hui, je suis sans doute de la vieille école !» Le président poursuit comme s'il n'avait rien entendu : «Vous avez fait élever votre enfant par vos grands-parents afin de pouvoir travailler. Aussi lorsque votre amant rentrait du travail, il trouvait la maison vide. Vous étiez encore derrière le comptoir du magasin où vous travailliez comme vendeuse. Votre amant se sentait négligé. Il fallait qu'il s'occupe du ménage.» Le visage carré, l'œil malicieux du procureur s'animent d'un grand sourire : «Notre président est comme moi... Il a de la bouteille.» La salle fait : «Oh !» Le procureur continue : «Mais je suis sûr que pour certains de nos jurés, cette image du conducteur de poids lourds, ceint d'un tablier de cretonne et maniant l'aspirateur, n'a rien de choquant.» Le président reprend sa lecture d'une voix tout de même un peu contrariée : «Heureusement, votre amant était passionné de football. Il retrouvait ses amis, d'abord une fois par semaine puis de plus en plus souvent. Enfin, il s'absenta des nuits entières qu'il passait avec une serveuse du restaurant Rose. La liaison était intime et paraissait durable. Tout le monde était au courant sauf vous». Nouveau silence du président pour entendre la réflexion du procureur goguenard : «Eh oui... Messieurs les jurés. On meurt de faim au Cambodge. On va sur la lune. On construit des centrales nucléaires. Mais les maris vont toujours au football et trompent toujours leurs femmes avec des serveuses de restaurant. La télévision vous prévient que demain il faudra prendre votre parapluie. La radio vous signale que vous aurez des embouteillages sur telle ou telle route. Les journaux vous annoncent que la boîte de cirage a baissé de dix centimes à votre supermarché, mais les amants trompés ne sont toujours pas informés... — C'est le 19 juin... reprend le président, qu'avertie par votre belle-mère, vous avez connu votre infortune.» Le président ne peut empêcher le procureur, hilare, de s'exclamer : «Car il y a toujours des belles-mères, messieurs les jurés ! On ne se marie plus mais on a quand même une belle-mère. La belle-mère résiste. La belle-mère survit !» Le président, agacé, s'explique : «C'est une erreur dans la rédaction de l'acte : je veux dire que lorsque la mère d'Erni Schmidt vous a prévenue de votre infortune vous avez fait des reproches à votre amant. Il vous a répondu : Puisque c'est comme ça, nous allons nous séparer. Ce à quoi vous avez répliqué qu'il n'en était pas question.» Le président marque une pause, devinant à l'avance que le procureur va vouloir intervenir, et le laisse faire patiemment : «Vous remarquerez, messieurs les jurés, dit celui-ci, que puisque cet homme et cette femme ne sont pas mariés, rien ne l'autorisait à refuser cette séparation. Mais, mariage ou pas, les femmes sont ainsi faites et les hommes aussi très souvent, qui considèrent très vite l'être avec lequel ils partagent leur existence comme leur propriété. Dans ce cas particulier, je crois que l'accusée tenait surtout à ne pas donner raison à ses parents qui avaient toujours vu cette union d'un mauvais œil.» (A suivre...)