Depuis trois jours, la rue gronde à nouveau dans une Egypte qui n'a pas trouvé encore ses repères. Les affrontements entre les manifestants de diverses tendances et les forces de l'ordre ont déjà fait 20 morts et plusieurs blessés. Le départ des généraux est réclamé avec insistance comme l'avait été celui de Moubarak il y a quelques mois. La police tirait des grenades lacrymogènes sur des centaines de manifestants répartis en petits groupes sur la place et aux alentours, qui répondaient en jetant des pierres, selon des images retransmises en direct par la télévision publique. Vingt personnes ont perdu la vie dans ces affrontements entre manifestants hostiles à l'armée au pouvoir et forces de l'ordre, a annoncé ce lundi matin le ministère de la Santé, cité par la télévision publique. La télévision ne précise pas de date pour ces morts, et ne donne pas de détail sur les causes de ces décès ou les identités des victimes. Le précédent bilan, basé sur des sources officielles et médicales, était de 15 morts depuis le début des affrontements samedi dernier dont 14 au Caire et un à Alexandrie au nord du pays. Ces affrontements se déroulent à une semaine du début des premières élections législatives depuis la chute en février dernier du président Hosni Moubarak. Les manifestants réclament la fin du pouvoir militaire qui s'est installé depuis la chute de Moubarak. Les slogans visent en particulier le maréchal Hussein Tantaoui, chef du Conseil suprême des forces armées (CSFA) et premier dirigeant de fait du pays. Dans la nuit de dimanche à lundi, des milliers d'Egyptiens occupaient la place Tahrir après avoir repoussé la police, tandis que de violents affrontements se poursuivaient dans les rues adjacentes au site emblématique, épicentre de la révolte qui a chassé le président Moubarak. Des protestataires lançaient des pierres et des cocktails molotov en direction des policiers, qui répliquaient avec des tirs de fusils et de balles de caoutchouc. Des manifestants défilaient également à Ismaïlia, sur le canal de Suez, selon une source des services de sécurité, tandis que des affrontements ont éclaté à l'issue des funérailles du jeune homme tué à Alexandrie, selon l'agence officielle Mena. A Suez, des militaires tiraient en l'air pour disperser des manifestants, au lendemain d'affrontements dans cette ville située sur la mer Rouge. Des défilés réclamant que le pouvoir, aux mains de l'armée depuis plus de neuf mois, soit rendu aux civils, avaient également lieu dans le centre du pays à Qena et Assiout, selon des responsables de la sécurité. Quelque 55 personnes ont été arrêtées hier dimanche, selon la même source. Ces affrontements rappelant les scènes de la révolte contre le régime au début de l'année ont débuté samedi dernier au lendemain d'une manifestation place Tahrir de dizaines de milliers d'Egyptiens. Cette démonstration de force, menée par les islamistes, visait à réclamer le retrait d'une déclaration constitutionnelle présentée par le gouvernement, qui exemptait en particulier le budget de l'armée de tout contrôle parlementaire. L'armée a promis de rendre le pouvoir aux civils après l'élection d'un nouveau président. La date de la présidentielle qui doit suivre les législatives n'est toutefois pas encore connue, ce qui suscite de nombreuses craintes de voir les militaires s'accrocher au pouvoir. Ces troubles ont relancé les craintes que les législatives, qui doivent débuter le 28 novembre prochain et s'étaler sur plusieurs mois, ne soient marquées par des violences. L'armée a dit « regretter » les événements actuels, appelant le gouvernement a rencontrer les forces politiques pour y mettre fin, tout en réaffirmant s'en tenir au calendrier électoral établi, dans un communiqué lu dans la soirée à la télévision publique.