Débat - L'intérêt des peintures dans la compréhension de l'histoire de la ville algérienne a été mis en exergue lors d'une rencontre hier sur le patrimoine architectural national, à Oran. «Les toiles d'époque doivent être exploitées au même titre que tous les autres types de sources historiques», a estimé M. Sidi Mohamed El-Habib Benkoula, spécialiste en urbanisme et enseignant à l'Université d'Oran. Dans sa communication consacrée à «La ville algérienne du XIXe siècle», l'intervenant s'est précisément focalisé sur les trois dernières décennies (1800-1830) ayant précédé l'occupation française (1830-1962), pour donner un aperçu global du paysage social et urbain à l'époque considérée. S'appuyant sur les représentations contenues dans plusieurs œuvres picturales remontant à cette période (1800-1830), il a fait observer que «l'espace social était clairement codifié et les ethnies maintenues dans leurs différences». «Les peintures, particulièrement orientalistes, renseignent sur l'ambiance qui régnait au sein de cet ensemble de fortifications qui formaient les villes au sein des quatre beyliks de la Régence», a relevé M. Benkoula qui a examiné divers tableaux d'époque. La projection de ces toiles, accompagnée des explications du spécialiste, a permis à l'assistance de s'imprégner du contexte social, de l'ambiance urbaine et de l'esthétique architecturale à travers des illustrations réalisées principalement à Alger (Casbah, Bab Azzoun, Djemaâ El-Kebir) et Oran (Mosquée du Pacha, Palais du Bey). Les représentations spécifiques à cette époque ont été également confrontées avec la période ultérieure, M. Benkoula étant amené à dresser le constat que «l'occupant français a introduit des transformations de basse qualité, alors que les monuments en question étaient à l'origine porteurs de savoir-faire, avec de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux pour la construction, de mosquées notamment (pierre taillée)». Les modifications opérées par les Français ont causé, entre autres, des détériorations sur les façades de nombreuses mosquées et des dérèglements au plan urbain, a-t-il indiqué en faisant remarquer, à l'appui d'une peinture de la rue Bab Azzoun, que «même les chameaux avaient leur propre voie de passage avant 1830». Cette rencontre a été également marquée par l'intervention de Javier Galvan, architecte, qui a choisi d'aborder le sujet de l'architecture algérienne et espagnole au XIXe siècle. M. Galvan a mis l'accent sur l'importance du patrimoine urbain et ses dimensions interculturelles en évoquant des pages de l'histoire algéro-espagnole, notamment à Oran où le Fort de Santa Cruz est le témoin vivant de la période d'occupation espagnole qui a duré près de trois siècles (1509-1792). Plusieurs jeunes architectes et étudiants dans ce domaine ont assisté à cette rencontre qui intervient dans le cadre de la célébration du Mois du patrimoine, placé cette année sous le thème «Patrimoine culturel et mémoire nationale : pour que nul n'oublie».