Explication - C'est faire une erreur que de considérer de simples menteurs comme étant des mythomanes. «Nous sommes tous des menteurs, à des niveaux plus ou moins importants. Néanmoins, nous avons conscience de nos mensonges et de la raison pour laquelle on les utilise : pour éviter de blesser quelqu'un, tourner les choses à notre avantage, vendre ou arnaquer. Contrairement au mythomane, le menteur altère la vérité pour tromper délibérément l'autre. Un mythomane, lui, ment pour vivre, pour croire à ses propres mensonges. Il ne ment pas pour tromper les autres, mais a besoin que les autres adhèrent à ce qu'il dit pour y croire lui-même. Il ne sait pas faire la différence entre la réalité et les événements issus de son imagination. La mythomanie est une véritable pathologie, qui peut également être le symptôme d'un désordre psychiatrique plus ou moins grave, névrotique ou psychotique», estime le sociologue Mourad Guenfoud. Comme la plupart des affections psychologiques, tout débute dans l'enfance où nous sommes tous des mythos en puissance. «Vers 3 ou 4 ans, les enfants découvrent que les adultes ne savent pas tout, et donc qu'on peut les duper. Ils manipulent suffisamment bien le langage pour abuser les grands et obtenir ce qu'ils désirent : éviter une punition ou obtenir une part de gâteau en plus. C'est la grande découverte du pouvoir du mensonge qui ne s'achèvera pour ainsi dire jamais. Puis, l'enfant se crée des histoires imaginaires et fabuleuses, des amis inventés pour se créer son propre monde dans lequel il est le roi. L'enfant croit vraiment à ce qu'il raconte et ça n'est pas inquiétant. En effet, c'est une étape normale de l'enfance.» Là où il y a tout lieu de s'inquiéter, «c'est quand cette tendance tend à subsister à l'âge adulte. Néanmoins, tous les mythomanes ne se ressemblent pas». Au cas où la mythomanie serait décelée, alors quelle attitude adopter ? Le suivre dans ses aventures fabuleuses ou le dénoncer pour le forcer à accepter la réalité ? En fait, même les spécialistes n'arrivent pas à se prononcer sur la question, ceci d'autant plus qu'il est très difficile d'évaluer le degré de lucidité du sujet mythomane. «Suivre et accepter les mensonges du mythomane pour ne pas le blesser est contreproductif car de cette façon, il s'enfermera encore plus dans son monde imaginaire. En outre, il ne faut pas non plus le forcer à accepter la réalité car c'est justement celle-ci qu'il a besoin de fuir, pour ses propres raisons qui l'ont conduit à se réfugier dans son monde imaginaire. C'est pour lui une question de survie que de s'échapper des réalités. Pas évident de savoir sur quel pied danser face à la mythomanie d'un proche. A chaque cas ses spécificités. La meilleure chose à faire est de l'encourager à se faire conseiller par un psychiatre. Une analyse peut aider à trouver les causes profondément enfouies dans l'inconscient et par là même, offrir une voie vers la guérison.»