Le long métrage de fiction algérien, Yema, de Djamila Sahraoui, a inauguré, hier, à Ouagadougou (Burkina Faso), la compétition du 23e Fespaco qui se tient jusqu'au 2 mars dans la capitale burkinabé. Djamila Sahraoui, déjà primée au Fespaco en 2007 pour le film Barakat, a présenté un drame familial poignant, proche dans son inspiration de la tragédie grecque, ainsi qu'elle l'a, elle-même, défini à l'issue de la projection. Réalisé en 2012, Yema met en scène l'histoire de Ouardia, interprétée par la cinéaste, une mère qui tente de reprendre une vie normale dans une maison isolée de la campagne après la mort de son fils Tarik, un militaire probablement tué par son frère Ali, dirigeant d'un maquis islamiste. Le film met l'accent sur la souffrance de cette «maman» qui, pour surmonter ses peines, s'est occupée à cultiver son jardin à l'abandon et a adopté un petit enfant, dont la mère est décédée après l'avoir mis au monde. Le public, interrogé après la projection, a été unanime dans son appréciation de ce film «poignant» et «tragique» selon certains, alors que d'autres ont salué «la grande qualité de réalisation d'une œuvre qui a su transmettre une forte charge émotionnelle avec subtilité en jouant sur les silences et les non-dits». Quant à la cinéaste, elle a confié avoir voulu «épurer au maximum» son film pour mieux transmettre «le destin tragique de cette famille maudite, soumise, comme dans une tragédie grecque, à l'inexorable». Le film se passe dans un univers frappé par la sécheresse et la douleur des trois seuls personnages : la mère, le fils et le garde qu'Ali a envoyé pour assurer la sécurité de Ouardia. Tout le film se déroule presque de façon muette et sans musique, hormis pour le générique de fin. «C'est une histoire qui évoque la situation actuelle de l'Algérie», a déclaré devant la presse la réalisatrice. «L'Algérie, depuis un certain moment déjà, vit sous des actions terroristes. Je pense qu'on traite un peu des problèmes qui nous concernent, qui nous préoccupent...», a-t-elle indiqué. Concernant ses choix artistiques, Djamila Sahraoui a expliqué avoir épuré pour ne garder que «l'essentiel». «Même dans les éléments constitutifs du film, j'ai évité les faits prosaïques pour laisser s'exprimer des éléments primordiaux, comme l'eau, le feu, la terre, l'air.» La réalisatrice s'est réjouie que son film ait été choisi pour l'ouverture des compétitions du Fespaco-2013. «C'est un honneur pour moi, je suis très contente que mon film soit le film inaugural», a-t-elle confié, se félicitant que les femmes soient «à l'honneur» pour la 23e édition du festival. «Je savoure ces moments».