Tighmit c'est un petit point noir de l'Algérie profonde dans la wilaya de Bouira ; N'sigha, c'est aussi un petite localité de Khenchela. Leurs points communs ? 50 ans après l'indépendance, ils n'ont ni eau, ni électricité, ni gaz, ni routes. Ils n'ont que la misère et un quotidien fait de privations et de frustration. Alors ? Ils protestent, ils expriment leur ras-le-bol, selon leurs moyens. Entre le discours lénifiant chargé de promesses creuses des responsables, et la réalité amère vécue par bon nombre de citoyens, le fossé se creuse davantage. Les revendications sont les mêmes : manque d'infrastructures routières, pas d'eau, pas d'électricité, pas de gaz, pas de travail, pas de perspectives du tout. En fait, un quotidien façonné par les privations et les frustrations, dures à supporter. C'est cela l'Algérie d'en bas où il ne fait pas bon vivre, celle qui entend parler des richesses du pays sans jamais les partager ; celle qui est condamnée à lever les yeux pour tenter d'apercevoir l'envol de l'Algérie d'en haut où misère et pauvreté sont bannies à jamais. Cinquante après le recouvrement de l'indépendance, des villages, des communes, des daïras végètent, vivotent, agonisent. Quelle est leur faute ? Quel crime ont-ils commis pour avoir été délaissés, voire méprisés ? Un demi-siècle s'est écoulé sans que les responsables qui se sont succédé à la tête de ces communes et daïras n'ont rien fait. Pour ces «damnés» de la Terre, il ne reste qu'une seule action : sortir dans la rue afin d'exprimer leur colère. Les deux derniers exemples de ce ras-le-bol populaire, nous viennent de village Thigmit dans la wilaya de Bouira et des communes de Kaïs, Ouled Rechache, N'sigha, Tamza et Aïn Touila dans la wilaya de Khenchela. En effet, les habitants du village Thigmit (Bouira) ont fermé depuis une semaine le siège de la commune d'Ahl Laksar, située à une trentaine de kilomètres au sud-est du chef-lieu de la wilaya, pour protester contre la dégradation de leur cadre de vie. De nombreux citoyens de ce village, des jeunes pour la plupart, ont ainsi fermé le siège de l'Assemblée populaire communale (APC) en signe de protestation contre les problèmes de développement auxquels ils sont confrontés depuis de longues années, notamment le «calvaire» de la route, une piste reliant leur village au chef-lieu de commune. «Cette route n'est pas goudronnée et demeure impraticable, notamment en période hivernale. Un projet d'aménagement de cette route pour désenclaver le village, distant de 7 km, était prévu avant d'être annulé pour des raisons inconnues», ont expliqué plusieurs citoyens à l'APS. «Un montant de 700 millions de dinars avait été débloqué pour réaliser cette route, mais finalement le projet a été annulé pour des raisons inconnues. Ce problème nous enfonce encore dans l'isolement», s'est plaint un jeune citoyen. Outre la route, les citoyens du village agricole font face à de manquements en matière de développement. Les citoyens réclament de l'eau potable, le raccordement de leur foyer au réseau de gaz naturel et la réalisation de l'assainissement pour le village, selon la feuille des revendications transmise aux autorités municipales. Dans la wilaya de Khechela, en revanche, les citoyens optent pour la manière la plus violente mais aussi la plus réputée à savoir bloquer à l'aide de pneus brûlés et autres objets de fortune, plusieurs routes nationales à hauteur de leur localité. Une vague de colère et de protestation populaire a secoué, ces derniers jours plusieurs, communes de la wilaya de Khenchela. «Des mouvements inédits se sont vite propagés, créant un climat de panique et une tension sans précédent dans la région», écrit-on dans les colonnes du quotidien Liberté dans son édition de ce mercredi. Selon le même quotidien, les habitants des communes de Kaïs, Ouled Rechache, N'sigha, Tamza et Aïn Touila sont descendus dans les rues pour faire bouger les choses et améliorer leurs conditions de vie. «Les protestataires ont décidé de recourir à cette action pour exprimer leur mécontentement quant aux conditions qualifiées d'intenables dans lesquelles ils vivent depuis des années», a-t-on encore souligné. La colère avait pour origine la politique de la sourde oreille adoptée par les autorités locales devant leurs doléances qu'ils ne cessent de réitérer depuis plusieurs mois. Les revendications ont trait à l'éclairage public, l'aménagement urbain inexistant, le problème de logement, l'état très dégradé des routes, l'eau potable et le chômage. La liste est longue. Comme l'est aussi la liste des villages algériens touchés par le marasme social...