Vécu - Baba Noël est une comédie noire, un film sur la situation de l'émigré clandestin et sur son quotidien. Le cinéma magrébin s'est emparé ces dernières années du phénomène de l'émigration clandestine, appelée chez-nous en Algérie, la «harga», mais très peu de cinéastes se sont penchés sur la situation de l'émigré en terre étrangère, c'est-à-dire ceux que l'on nomme les «sans-papiers». Walid Matar, un jeune réalisateur tunisien, s'est intéressé à cette question et a abordé le sujet des «sans-papiers» dans son film Baba Noël. Ce court-métrage raconte l'histoire d'un jeune Tunisien – en France et ailleurs à l'étranger (en Europe), le Tunisien, l'Algérien et le Marocain glissent sous l'appellation Maghrébin ou «Nord Africain». Aux yeux des Occidentaux, il n'y a pas de distinction de nationalité – qui accepte d'endosser le personnage du père Noël pour vivre. Quotidiennement, Foued, qui vit dans la clandestinité, nourrit cette peur d'être arrêté par les autorités françaises et renvoyé chez lui. Avant il travaillait dans le bâtiment, et un jour, il a accepté l'offre que lui a faite un ami, lui aussi émigré clandestin, de faire le père Noël et se faire prendre en photo, à quelques jours de la Noël, dans un centre commercial. S'il a accepté l'offre c'est parce qu'il sait qu'il va rester dans son costume de père Noël invisible, à l'abri des regards et de l'attention de la police française. Le costume du père Noël rend «invisible», en ce sens qu'il assure à Foued l'anonymat. «Souvent, on me dit que je parle dans ce film de l'émigration clandestine, thème que j'ai déjà abordé dans mes précédents documentaires, mais là ce n'est pas le cas. Je me suis intéressé dans mon film Baba Noël aux sans-papiers. Je parle de leur quotidien, de leurs rêves et de leurs espoirs», explique Walid Mattar, qui qualifie son film de «comédie noire». Walid Mattar, qui estime que l'émigré maghrébin, celui qui vit dans la clandestinité, n'a pas de sécurité sociale, n'a pas d'avenir et vit au quotidien dans la peur de se faire arrêter et expulser dans son pays d'origine, explique que la situation de ce dernier est tellement désespérante qu'il est prêt à renier sa culture et ses principes, donc à se renier. Ce reniement est visible dans le personnage de Foued. L'on assiste à la dépersonnalisation de ce dernier. «Jouer le personnage du père Noël, endosser son costume, c'est en effet une aliénation de l'individu culturellement, et cette aliénation se fait par le biais du vêtement (le costume ne fait pas partie de notre culture)», explique-t-il, et de renchérir : «Le déguisement avilit sa personne. Il devient pareil à un guignol. Il est dépersonnalisé jusqu'au ridicule. Je voulais montrer la pression et l'oppression de l'argent sur l'individu. Pour si peu, l'homme est prêt à se vendre et à se ridiculiser et à perdre de sa valeur. Même le personnage est physiquement incompatible à cette culture du père Noël. Son apparence physique est typique.»