Le mot charika a, aujourd'hui, le sens de «société, entreprise», nationale quand on le fait suivre de wataniyya, privée quand il est accompagné de khâs : c?est un terme du vocabulaire économique moderne. Dans l'emploi usuel, la charika, on dit surtout la charka, c'est l?association tout court, le fait de se réunir, de se grouper, à deux ou à plusieurs, dans un but déterminé. La définition est évidemment très large et l?association peut être aussi bien une alliance, une amitié, qu'une coalition, voire une ligue. Mais en général, comme pour les sociétés économiques modernes, il s?agit d'associations poursuivant des buts économiques : une affaire, un marché, un négoce... Si l'Algérien a volontairement le sens de la sociabilité, il se méfie beaucoup de l'association qui, croit-il, apporte plus de désagréments que de bénéfices. La langue traduit cet état d?esprit par de nombreux proverbes et expressions qui mettent en garde contre le danger des entreprises communes. Le plus répandu des proverbes est un jeu de mots : «Charika halika» (l'association est la ruine). Un proverbe kabyle va même plus loin en soutenant que «si l'association était une bonne chose, les morts partageraient leur tombe». En fait, les proverbes ne retiennent, souvent, que les situations extrêmes et, fort heureusement, il y a, en Algérie, beaucoup de gens qui s'associent et qui travaillent ensemble. Certains dictons, d?ailleurs, ne mettent en garde que contre certains types d?associations, celles-là même qui sont susceptibles de générer des conflits : «Ddar u lemra ma fi-hûm charka» (La maison et la femme ne peuvent être l'objet d'une association). Et quand une association bat de l'aile, on conseille aux associés de se séparer à l'amiable : «Akhsar wa fâreq» (perds et pars). Signalons pour finir, que le mot qui désigne l'associé, chriki, a pris, dans le langage des jeunes, le sens de «copain».