Bras de fer ■ Le parquet turc a requis hier, vendredi, un mandat d'arrêt contre l'imam Fethullah Gülen, adversaire du Président islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan. M. Gülen, 73 ans, est accusé par le parquet d'être à la tête d'un groupe «criminel». La télévision d'Etat, TRT, avait annoncé plus tôt le lancement du mandat d'arrêt, avant de revenir sur cette information. Cet imam, exilé depuis 1999 aux Etats-Unis, est accusé d'être à la tête d'une organisation terroriste armée, d'après une copie du document publiée par des médias turcs. Le régime du président islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan, l'accuse de chercher à miner l'Etat turc. Même si elle était confirmée, une telle mesure n'aurait qu'une portée symbolique, car les Etats-Unis ont, par le passé, toujours refusé de livrer Fethullal Gülen aux autorités turques. Outre cet imam, la justice turque a inculpé durant cette même journée d'hier de terrorisme le patron d'une chaîne de télévision d'opposition. Le directeur de la chaîne Samanyolu, Hidayet Karaca, avait été interpellé dimanche dans le cadre d'une vague d'arrestations à Istanbul et dans d'autres villes, qui avait visé au total 30 personnes (journalistes, policiers, scénaristes et réalisateurs de télévision) dans les milieux présumés proches du réseau dirigé par M. Gülen. Ekrem Dumanli, directeur de publication du journal Zaman du même groupe de presse, qui frôle le million d'exemplaires, a, pour sa part, été relâché. Dans une lettre ouverte, le groupe de presse incriminé à dénoncé jeudi une «chasse aux sorcières» et une atteinte à la liberté de la presse. En effet, créant au long des années ses propres médias, M. Erdogan s'en est ouvertement pris à la presse indépendante en Turquie. En 2012, ce pays détenait le triste record de 76 reporters sous les verrous. «Ils ont humilié la Turquie aux yeux de la communauté internationale. La Turquie a été sérieusement blessée», a-t-il dit, affirmant que la procédure judiciaire, orchestrée, selon lui, par des autorités gouvernementales «corrompues», était digne des «films d'Hollywood». Face au durcissement du régime, les critiques de Bruxelles dénonçant les atteintes à la démocratie en Turquie ont eu peu d'effets et ont provoqué un coup de froid entre Ankara et le bloc européen auquel elle souhaite adhérer. M. Erdogan a contre-attaqué avec une virulence particulière. «Mêlez-vous de vos affaires», a-t-il lancé à l'attention des dirigeants européens. R. I. Agences Genèse Premier ministre de 2003 à 2014 avant d'être élu à la magistrature suprême en août dernier, M. Erdogan répète sans cesse sa détermination à neutraliser les partisans de la confrérie Gülen, qu'il accuse d'avoir constitué un «Etat dans l'Etat» et d'avoir comploté dans l'ombre pour provoquer sa chute en orchestrant et manipulant des enquêtes de corruption. «Nous allons les poursuivre jusque dans leur repaire», a-t-il lancé, mercredi, accusant le mouvement Gülen, d'être une «structure parallèle utilisée par un pays du Sud», à savoir Israël. Soupçonné d'être à l'origine des enquêtes pour corruption visant personnellement M. Erdogan et son entourage politique, qui avaient provoqué une grave crise politique à l'hiver 2013-2014, le mouvement a nié toute implication.