Défi Le bey n?a pas du tout été impressionné par la réputation et les pouvoirs qu?on attribue au saint. Pour lui la seule puissance qu?il reconnaisse est celle de l?épée ! La ville de Ksar el-Boukhari est située à 160 km d?Alger, sur la rive droite de l?oued Chlef. Le ksar ? dans le dialecte local, village fortifié ? est construit sur un mamelon. à 6 km au nord-ouest de Ksar el- Boukhari se trouve la seconde ville importante, Boghar, nichée à 985 m d?altitude. C?était, à l?époque romaine, un poste de surveillance militaire. L?émir Abdelkader en a fait, durant la guerre contre les Français, un de ses établissements militaires, chargé de surveiller l?avancée des troupes coloniales. Si les habitants de Ksar el- Boukhari se revendiquent majoritairement des Ouled Naïls, ceux de Boghar, les Ouled Antar, se donnent, eux, pour ancêtre, le poète et guerrier de la période pré-islamique, Antar Bencheddad. Selon les tenants de cette origine, les descendants de Antar, de race noire, se seraient métissés en se mêlant aux populations berbères : on en veut, pour preuve, de cette filiation, le teint hâlé, voire très foncé des gens de cette tribu. La tradition rapporte que la ville a été édifiée par Sidi M?hammed el-Boukhari, fils de Sidi Seddik. C?était, comme tous les saints, un homme très pieux qui n?aimait pas l?injustice. Or, l?époque où il a vécu (le XVIe siècle) était une époque très trouble : les Turcs, appelés au début pour défendre le pays contre l?incursion des Espagnols et des Portugais, s?y sont installés et ont commencé à exercer leur domination, levant de lourds impôts, réprimant les populations qui ne se soumettaient pas à leur volonté. Or voici qu?un bey arrive au pays du Titteri, voulant soumettre les populations encore indépendantes. Il prend quelques personnes et les interroge sur les chefs de la contrée. ? Notre maître, répondent-ils, est Sidi M?hammed Ould el-Boukhari ! ? Et qui est donc cet homme ? ? C?est un sage et pieux, qui s?occupe de prière et de jeûne. ? Peuh, répond le bey, parlez-moi de son armée, du nombre de ses soldats. Quelles sont ses armes ? Quelle est sa puissance, ? Sidi M?hammed tient sa puissance de Dieu seul ! ? S?il n?a pas d?armée, je ne le crains pas ! Allez dire à votre maître qu?il doit me faire soumission et payer tribut, autrement je le châtierai ! Les hommes sont libérés et vont retrouver Sidi M?hammed qui a, alors, son camp à Aïn Tlata, avec ses fidèles. On lui rapporte les propos insultants du bey. Les hommes qui l?entourent sont prêts à aller combattre l?ennemi, au péril de leur vie, mais le saint homme leur dit. ? Ne vous en faites pas, je vais l?humilier comme il cherche à nous humilier et je lui ferai subir une défaite comme il ne l?a jamais subie ! ? Il a une armée puissante, lui dit-on ! ? Il n?y a de puissance qu?en Dieu ! Avec son armée, le bey arrogant sera humilié, et c?est lui qui viendra vers nous, pour nous supplier ! Le bey, lui, a dressé son camp et attend le matin pour livrer bataille au saint. Il n?a pas du tout été impressionné par sa réputation et les pouvoirs qu?on lui attribue. La seule puissance que le bey reconnaisse est celle de l?épée ! (à suivre...)