Le premier roman algérien, intitulé Musulmans et Chrétiens, d?Ahmed Brouri, date de 1912. Il a été publié sous forme de feuilleton dans le journal oranais El-Hack. Cependant, selon les historiens et les critiques littéraires, il est difficile de remonter plus loin à cause de l?occultation d?un pan important de l?histoire que les dirigeants de la période postcoloniale jugeaient défavorable à une certaine idéologie hégémonique et uniformisante. Cela dit, les années vingt sont considérées comme la période où un bouillonnement littéraire donna lieu à une ébauche suffisamment perceptible de ce qu?allait être la littérature algérienne. A cette époque, un noyau de jeunes romanciers s?était constitué pour former l?élite intellectuelle. On citera entre autres : Caïd Bencherif, Choukri Khodja, Bamer Slimane Ben Brahim, Abdelkader Hadj Hamou, Mohamed Ould Cheikh? Ces hommes de lettres sont les pionniers de la littérature algérienne de graphie française. Jean Dejeux les cite dans sa bibliographie méthodique et critique de la littérature algérienne de langue française. Il faut préciser que ce microcosme puisait ses ressources dans une pensée minoritaire d?essence progressiste, mais souvent sujette à la controverse. Il semblerait, en fait, que l?on évoque rarement cette partie de l?histoire de la littérature algérienne et ce, pour des raisons politiques. «L?occultation de ces ?uvres et de leurs conditions historiques de production nous empêche de comprendre dans sa complexité la littérature d?aujourd?hui. En effet, de manière plus ou moins consciente, le roman algérien de langue française est le résultat de tout un processus d?élaboration qui commence au début du XXe siècle. Curieusement, ces premiers écrivains et la période qui les a vu naître sont l?objet d?un certain nombre de préjugés.» Il faut signaler qu?à cette époque du colonialisme français, l?école n?était pas accessible à tous. Beaucoup d?Algériens se rabattaient sur l?école coranique qui dispensait un savoir purement religieux qui ne leur permettait pas de s?ouvrir sur d?autres civilisations ; bien au contraire, cela renforçait leur comportement haineux envers tout ce qui est différent.