Catégorie n Pour une raison ou pour une autre, certaines personnes sont contraintes de passer l?Aïd en solitaire. Qui sont ces gens ? Où sont-ils ? Que font-ils dans la vie ? Des questions auxquelles tentent de répondre ces témoignages. Pour Nour Eddine, la fin du ramadan est synonyme de deuil, car elle lui rappelle la tragédie dont a été victime toute sa famille, assassinée par un groupe terroriste à deux jours de l?Aïd Esseghir : «Depuis ce drame, le jour de l?Aïd, je reste enfermé chez moi avec mes souvenirs. Il m?est difficile de partager cette douleur avec d?autres personnes ou de me monter gai juste parce que c?est l?Aïd.» Karim, 44 ans, devenu handicapé après un grave accident de voiture en 2002 : «J?ai du mal à fêter l?Aïd? parce que l?Aïd fait mal à ceux qui sont privés de bonne santé. Cette fête me rappelle l?isolement, l?absence d?efficacité.» Certains étudiants du Sud ne pouvant pas se payer le voyage passent, eux aussi, cette fête en solitaire, dans les campus universitaires. «Ma famille réside à Touggourt. Il m?est difficile avec ma bourse d?étudiante de m?offrir un voyage dont le coût peut atteindre les 2 000 DA. J?aurais souhaité profiter de ces vacances d'automne avec ma famille et par la même occasion partager les joies de l?Aïd Seghir avec eux, mais ne dit-on pas que les vents vont toujours à l'opposé des bateaux ?», regrette Khadija, étudiante à l?université de Bab Ezzouar. Nadia, 25 ans, est orpheline depuis deux ans : «Depuis que mes parents ne sont plus là, tout est différent. D'abord, l?Aïd est devenu un jour ordinaire et puis le repas princier souvent préparé à cette occasion s'est transformé en un simple sandwich à réchauffer.» Saïd,43 ans, est employé dans une société mixte au sud du pays : «L?Aïd, c'est un état d'esprit plus qu'autre chose, je le remarque à chaque fois que ce jour revient et me trouve à mon poste de travail. Le domaine des hydrocarbures nécessite une permanence, ce qui nous contraint parfois à passer certaines fêtes loin de nos familles.» Ce témoignage est corroboré par Hamid, policier : «C?est devenu pour moi presque une habitude, les jours de fête, je suis souvent de service, au grand dam de ma famille qui a du mal à s'y faire.» Rahim, 39 ans, a passé près de 10 ans à l?étranger : «Il y a trois Aïd qui me resteront en mémoire, ce sont ceux que j?ai passés loin de ma famille à Madrid, en Espagne. On ne peut apprécier une fête religieuse lorsqu?on se trouve dans un milieu de culture et de religion différentes.»