Comme il ne pouvait plus supporter les hommes et leur méchanceté, le plus puissant de tous les sorciers avait décidé de quitter son pays et de se réfugier tout au sommet de la plus haute des hautes montagnes. Sitôt dit, sitôt fait... Il s'en alla. Un grand malheur s'abattit sur la nature : toutes les fleurs, celles des bois, celles des prairies, celles des collines, celles des bords de mer, celles du long des rivières et celles de lacs moururent instantanément. Pas une seule ne survécut. Le pays, jadis si beau et si fleuri, devint rapidement un désert. Tous les animaux, les oiseaux, les papillons, les insectes s'enfuirent après la mort des fleurs. Pour voir les fleurs, les habitants ne pouvaient user que de leur imagination. Mais les enfants, qui n'avaient jamais connu ces merveilles, ne voulaient pas croire les anciens. «Vous ne racontez que des histoires», leur disaient-ils et ils s'en allaient, tristes, dans le décor triste d'un pays sans fleurs. Parmi tous ces enfants, il en était un qui ne pouvait imaginer que tout eût disparu pour toujours. Lorsque sa mère, lassée de raconter l'ancien temps, se taisait, il réclamait encore et encore d'autres histoires car il aimait entendre parler de la beauté des fleurs. Il pensait que lorsqu'il serait un homme, il partirait à la recherche du grand sorcier et lui demanderait de redonner de la couleur au pays. Les années passèrent. Un jour, il fut grand. Son amour des fleurs avait grandi avec lui. Il s'en alla donc trouver sa mère et lui dit : «Mère, je vais m'en aller à la recherche du grand sorcier et lui demander de nous rendre les fleurs.» Sa mère le regarda avec des yeux remplis d'effroi. «Mais fils ! s'écria-t-elle, tout ce que je t?ai raconté n'était que des histoires. Il ne faut jamais croire aux histoires. Je te disais ce que ma mère me racontait parce qu'elle l'avait entendu raconter par sa mère qui le tenait de sa mère. Malheur à toi ! Les fleurs n'ont probablement jamais existé. Tu aurais beau marcher mille ans, jamais tu ne trouverais le sorcier qui vit tout en haut de la plus haute montagne.» Mais le fils ne l'écouta même pas, il prit son baluchon et s'en alla. Les gens du pays qui le voyaient passer se moquaient de lui : «Ce garçon est fou ! Il n'y a que les fous qui croient aux histoires», disaient-ils. Le jeune homme se dirigea vers le nord. Il marcha longtemps, longtemps, longtemps et arriva au pied d'une montagne, si haute, si haute que son sommet était invisible. Il tourna autour de la montagne, mais ne vit aucun sentier, seulement de la roche et des cailloux. Il tourna encore et encore. Las de tourner, il se dit : «Il faudra bien que je découvre un chemin. Le sorcier a dû le prendre pour atteindre le sommet.» Il inspecta avec attention les rochers et finit par découvrir une petite marche. En regardant de plus près, il aperçut une autre petite marche et puis encore une autre. Lorsqu'il leva les yeux vers le sommet de la montagne, il aperçut un escalier et il se mit à grimper sans jamais regarder en bas pour ne pas avoir le vertige. (à suivre...)