Exposition n Elles sont venues de partout avec armes et bagages, exposer ce qu'elles ont conçu : tapisserie, broderie, poterie, joaillerie, dinanderie, art culinaire, pâtisseries orientale et algérienne, tissage, élevage et même mécanique auto et électronique… La grande foire des femmes au foyer et de la femme rurale qui s'est tenue à la place Abderahmane-Mira, à Bab El-Oued, a malheureusement été quelque peu perturbée par le climat. Une météo ombrageuse en a décidé autrement. Mais il n'était pas question pour ces femmes venues de loin, de très loin, de Tamanrasset, de Tindouf, d'Illizi, pour ne citer que ces contrées reculées, de repartir sans vider leur «sac». Raconter leur vécu, décrire leur misère de femmes qui produisent, mais qui rencontrent mille et un accrocs pour faire écouler leurs produits. Des femmes qui ont fait de leur foyer une fabrique de richesses, mais qui souffrent le martyre pour gagner un sou. A peine 26 ans, Nawel S., est venue en taxi de la région de Berrahal de Annaba. 620 km de bitume à avaler durement pour une femme enceinte de cinq mois. «C'est vrai, j'ai pris un sacré risque, mais je voulais tant participer à ce rendez-vous. En fait, j'avais envie de parler de mon cas», dit cette femme, la première à nous avoir ouvert son cœur, parmi tant d'autres venues participer, à l'Institut de formation professionnelle de Birkhadem (Alger), à la première rencontre sur la participation active de la femme au foyer et de la femme rurale, organisée sous l'égide du département d'El-Hadi Khaldi. Ayant contracté un microcrédit auprès de l'Angem, Nawel a ouvert, fin 2005, un atelier de broderie. Les problèmes commencent sitôt après. «J'ai réussi à avoir les équipements nécessaires mais j'ai rencontré par la suite les pires difficultés pour commercialiser mes produits. Outre les différentes taxes auxquelles nous sommes soumises, nous les femmes artisanes, il y a le problème de transport mais surtout la concurrence déloyale des produits asiatiques qui inondent notre marché local», déplore-t-elle, la mine défaite. Nawel n'est pas encore arrivée à éponger sa dette de 40 millions de centimes. El Arem, 33 ans, vient, elle, de Laouana (Jijel). Elle aussi a une histoire à raconter : «J'ai suivi un stage de couture et une fois le diplôme en poche, j'ai contracté un crédit auprès de l'Angem. J'ai commencé à travailler sitôt après, mais la matière première coûte très cher, sans compter les problèmes de commercialisation qui me causent beaucoup d'ennuis», dit notre interlocutrice. Son grand problème demeure le local. «Mon local est ma chambre. La chambre de mon mari. Lorsqu'il va chercher du travail, je sors mon matériel et je commence à travailler, des heures et des heures. Où sont les 100 locaux par commune ? Moi, je veux bien avoir une réponse parce que j'ai fait une demande écrite depuis une éternité.» M. Zahra vient, elle, de Bouhnifia (Mascara). A 50 ans, elle est femme au foyer qui excelle dans l'art culinaire. Son grand problème : un atelier situé dans une cave où elle continue, malgré la moisissure, d'inculquer son art aux jeunes filles de Bouhnifia. «J'aime ce que je fais même dans une cave», nous lance-t-elle, un sourire en coin.