Avis n Lors de l'édition du festival du film amazigh d'Agadir qui s'est déroulée du 11 au 15 juin, quatre productions algériennes ont été récompensées. Il y a eu, pour rappel, le long-métrage (une fiction) Mimezrane d'Ali Mouzaoui qui a remporté le Grand prix et le prix du meilleur scénario. Le film Arezki l'indigène ou l'épopée d'un grand insoumis de Djamel Bendedouche a, lui, remporté le prix du meilleur rôle féminin. Hnifa de Ramdane Iftini et Samy Allam a reçu le prix du meilleur documentaire, et Loundja, un film d'animation de Mohamed Boukourdane a obtenu une mention spéciale du jury. Enfin le jury a apprécié le long-métrage Tagat et le court-métrage Tislatin n'oughanim respectivement des réalisateurs Lahoucine Chkir et Ahmed Baidou. Toutes ces distinctions obtenues dans un festival international, soulèvent aussitôt une interrogation : y a-t-il une pratique cinématographique algérienne ? En fait, le cinéma algérien, longtemps paralysé par de multiples crises notamment par la dissolution des entreprises chargées de la production et de la diffusion, semble renaître autrement. Il y a d'abord le court-métrage qui, lui, devient un genre cinématographique – de nombreux jeunes y multiplient d'ailleurs les expériences et parviennent à se distinguer dans les forums internationaux. Et il y a ensuite la cinématographie d'expression amazighe ; celle-ci se constitue en un segment du cinéma algérien. «C'est un cinéma algérien, sauf qu'il est d'expression amazighe», a relevé El-Hachemi Assad, commissaire du festival national du film amazigh et chargé culturel au Haut-Commissariat à l'amazighité. La tendance aujourd'hui notamment avec certains réalisateurs, à l'instar de Djamel Bendedouche qui, par le passé, a fait des films dont le scénario est en arabe dialectal, est la réalisation de films d'expression amazighe. D'autres réalisateurs suivront comme Amor Hekkar, l'auteur de La maison jaune. Car, à défaut d'une production globale de films, cette nouvelle tendance – s'agit-il d'une aventure ou d'une expérience cinématographique ? – a permis à l'Algérie de reconquérir – même si cela se fait de façon progressive, mais certaine – sa place dans les festivals internationaux. Ainsi, si l'Algérie était, par le passé, représentée par le cinéma tout court , aujourd'hui, elle est évoquée à travers une cinématographie d'expression amazighe. Si des réalisateurs comme Djamel Bendedouche se sont convertis à un cinéma d'expression amazighe, c'est seulement parce que cette expérience s'est présentée comme une opportunité de faire un film, de s'inscrire dans la continuité ou de prolonger la pratique cinématographique. C'est aussi de faire dans la diversité culturelle et linguistique et, du coup, présenter le cinéma algérien dans ses multiples facettes. Peut-on parler donc d'une réelle émergence d'un véritable cinéma ? La cinématographie amazighe ne peut, elle, et seule, représenter le cinéma algérien, ou bien couvrir tous les frais. Elle n'en est qu'une variante. Pour qu'il y ait vraiment une véritable relance, il faut obligatoirement envisager, selon les professionnels, une véritable activité permanente du cinéma en Algérie. Il y a certes une pratique – même si elle se fait à petite échelle, c'est-à-dire le rythme de production reste intermittent et parfois au forceps – mais pas une industrie, voire une institution chargée, en se basant sur une législation fondée et active, de soutenir et de promouvoir le 7e art. Les films en langue amazighe sont, il faut le dire, réalisés, pour l'instant, que pour la circonstance, c'est-à-dire pour être présentés dans le festival national du film amazigh – et par la même occasion dans les rencontres internationales. En outre, cette cinématographie connaît, à l'instar du cinéma en général en Algérie, la même problématique, celle du financement. De surcroît, il ne faut pas, et en aucun cas, présenter cette jeune cinématographie uniquement dans les festivals, il faut bien lui assurer sa programmation, l'inscrire dans un circuit de manière à lui garantir une rentabilité et en conséquence une longévité certaine.