L'ex-président égyptien Hosni Moubarak se dirige-t-il imperturbablement vers une réhabilitation qui ne dit pas son nom ? Le nouveau pouvoir militaire semble en tout cas travailler dans ce sens. Moubarak sera rejugé dans la seule affaire de corruption qui le maintenait en détention après l'annulation d'une condamnation à trois ans de prison. Officiellement une remise en liberté dépend d'une nouvelle décision de la justice, mais l'ex-Raïs semble déjà se diriger vers la sortie. Moubarak est détenu depuis avril 2011, après sa démission fracassante sous la pression d'une révolte populaire excédée par 30 années de pouvoir autoritaire. Il avait déjà bénéficié d'un abandon, en appel, des accusations de meurtre de manifestants qui lui avaient valu la prison à vie en première instance. Mais Moubarak était resté en détention dans un hôpital militaire du Caire dans le cadre de son procès pour corruption. La Cour de cassation vient d'ordonner l'annulation de sa condamnation initiale en mai 2014 à trois ans de prison pour «détournement de fonds publics pour plus de 10 millions d'euros pour la rénovation de ses palais présidentiels». Pour son avocat, Farid al-Deeb, Moubarak est libre, son client ayant «purgé sa peine». Le ton était déjà donné. La plus haute juridiction égyptienne avait également annulé la condamnation à quatre années de prison de ses deux fils, Alaa et Gamal Moubarak, dans la même affaire de détournement. Ce retournement de situation, inimaginable il y a peu, semble se dérouler dans une Egypte comme ankylosée. Le 30 novembre, l'Egypte avait accueilli dans l'indifférence l'abandon des accusations contre l'ex-Raïs pour son rôle dans la mort de 846 manifestants durant la révolte populaire en plein «printemps arabe», en janvier et février 2011. L'Egypte est désormais dirigée par l'ex-chef de l'armée Abdelfattah al-Sissi, élu Président après avoir destitué Mohamed Morsi en juillet 2013 et réprimé dans le sang les Frères musulmans dont il est issu. Les Egyptiens comme tétanisés par l'accélération des événements avaient peu réagi à la relaxe de l'ex-Raïs. A l'étranger les réactions sont également sans effets. Depuis la destitution et l'emprisonnement de Morsi, premier président élu démocratiquement après la révolte populaire de 2011, les organisations internationales de défense des droits de l'Homme accusent régulièrement le nouveau régime de Sissi d'être plus autoritaire et répressif que celui de Moubarak. Depuis le coup de force le 3 juillet 2013, plus de 1 400 manifestants pro-Morsi ont été tués par la police ou l'armée et plus de 15 000 personnes, essentiellement des membres des Frères musulmans, ont également été emprisonnées et des centaines ont été condamnées à mort dans des procès de masse. Même l'opposition laïque et de gauche n'a pas échappé à la répression. M. B./Agences