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Egypte : la révolution avortée
Moubarak blanchi de l'accusation de complicité de meurtres
Publié dans La Tribune le 30 - 11 - 2014

L'ex-président égyptien Hosni Moubarak a été blanchi des accusations de complicité de meurtres et de corruption. Bien que l'ancien raïs de 86 ans, bouté hors du pouvoir en 2011 par la révolte populaire, va rester en détention, la décision de la justice est d'une grande symbolique dans une Egypte qui se «normalise». Un véritable retournement de situation après le soulèvement populaire. Le régime Moubarak, exécré il y a quatre ans, est en passe d'être réhabilité dans l'opinion publique et les médias depuis que l'ex-chef de l'armée et actuel chef de l'Etat, Abdel Fattah al-Sissi, a repris les rênes du pouvoir. Le tribunal a abandonné les accusations qui pesaient contre l'ancien
président après la mort de centaines de manifestants durant la révolte de 2011, qui a mis fin à ses 30 années au pouvoir et avorté le risque de transmission familiale du pouvoir. Des centaines de personnes ont été tuées durant le soulèvement populaire de 2011 qui a duré 18 jours, durant lequel les manifestants réclamaient le départ de Moubarak et son régime.
L'ex-raïs a par ailleurs été acquitté d'accusations de corruption qui pesaient contre lui dans un autre dossier. Moubarak se trouve toujours en détention pour la simple raison qu'il purge actuellement une peine de prison de trois ans dans le cadre d'une autre affaire de corruption. Les deux fils de Moubarak, Alaa et Gamal, eux aussi accusés de corruption, sont également revenus dans les bonnes grâces. Les accusations pesant contre eux ont été abandonnées en raison de la prescription des faits. «Je n'ai rien fait de mal», a affirmé Moubarak dans une interview à la télévision. Une partie des accusations de corruption contre lui portait sur une affaire de vente de gaz naturel égyptien à Israël, qui se serait faite dans des conditions troubles. Dans le procès pour complicité de meurtres de manifestants, sept hauts responsables de la sécurité, dont un ex-ministre de l'Intérieur, Habib al-Adly, ont été acquittés par le tribunal.
La décision de la justice provoquera la joie des pro-Moubarak d'un côté et la consternation des familles des victimes de la répression de l'autre. À l'image de l'Egypte actuelle partagée entre le besoin de stabilité et la nécessité d'un minimum démocratique. Lors d'un premier procès, en juin 2012, Moubarak avait été condamné à la prison à perpétuité. Une sentence annulée «pour des raisons techniques» et l'affaire avait été rejugée. Le nouveau procès s'était ouvert en mai 2013. La nouvelle était dans l'air du temps. Depuis plusieurs jours la presse égyptienne tablait sur un acquittement de Moubarak. Ses procès, très médiatisés au départ, sont aujourd'hui éclipsés par la répression médiatico-juridique qui s'abat sur les Frères musulmans. Ces derniers sont accusés par les médias et une partie de l'opinion publique d'être derrière les violences qui ont secoué le pays depuis 2011. Après le coup de force de l'armée contre Morsi, plus de 1 400 manifestants ont été tués par la police et l'armée,
essentiellement au Caire, et plus de 15 000 Frères musulmans ou sympathisants ont été emprisonnés. Des centaines ont été condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs et qualifiés par l'ONU de «sans précédent dans l'histoire récente».
M. B./Agences


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