Mohamed Ziane Hasseni, chef du protocole du ministère des Affaires étrangères algérien est désormais libre de quitter la France. Avec, toutefois, deux obligations. Disposer d'une adresse en France où recevoir son courrier judiciaire. Et, surtout, ne pas contacter ou rencontrer l'ex-colonel du DRS, Mohamed Samraoui, dit Lahbib. Ce passe-muraille est le témoin clé dans l'affaire de l'assassinat en 1987 de l'avocat français Ali André Mécili. Il s'agit donc d'une simple levée du contrôle judiciaire auquel le diplomate était soumis depuis son interpellation à Marseille, le 14 août 2008. Par conséquent, les poursuites contre lui ne sont pas levées. Hasseni n'est pas encore définitivement tiré d'affaire. La logique de la bouteille à moitié pleine autorise tout de même l'optimisme. Et il est de rigueur comme en témoignent les déclarations mesurées de ses avocats. La levée du contrôle judiciaire est ce qu'elle est : un premier pas dans la bonne direction. Celle de la disculpation attendue car inéluctable de notre compatriote. Attente justifiée parce que le dossier de l'instruction est toujours vide. Bien sûr, l'espoir est permis vu qu'aucune preuve irréfragable n'a été apportée par l'accusation pour démontrer que Mohamed Ziane Hasseni et Rachid Hassani, commanditaire présumé de l'exécution de Mécili, ne feraient qu'un. A ce stade de l'instruction, la question de l'imparfaite homonymie dont est assurément victime le mis en examen n'est pas tranchée. Trop tôt pour qu'elle le soit car elle est exclusivement à la base de l'accusation. Si elle a reconnu implicitement la vacuité du dossier d'inculpation, la justice française ne pouvait pas se déjuger aussi promptement. Battre sa coulpe n'est pas inscrit dans son ADN étant donné qu'elle ne reconnaît presque jamais ses erreurs. L'affaire suivra donc son cours normal sur la forme comme sur le fond. Une confrontation entre Mohamed Ziane Hasseni et Mohamed Samraoui, dont le témoignage bancal a fondé l'accusation, semble être dans l'ordre des choses judiciaires. Une mise en présence de Hasseni, de Samraoui et de l'ex-capitaine des services Hichem Abboud, autre témoin important dans l'affaire, est possible. Dans les deux cas, le juge Alain Philibeaux, qui a succédé en janvier à Baudoin Thouvenot, devrait contraindre Samraoui à s'expliquer. En France ou en Allemagne, Samraoui devrait dire au juge pourquoi il a fait ce qui s'apparente désormais à un faux témoignage. Lui livrer ses motivations et les raisons l'ayant incité à mener son prédécesseur sur une fausse piste. Lui expliquer également par quel hasard il a assisté à la remise d'une partie de l'argent du «contrat» sur Mécili, par l'ancien capitaine de la DGPS, Rachid Hassani, à l'assassin présumé Abdelmalek Amellou. A cette date, en 1987, la transaction se serait déroulée dans une chambre d'hôtel feutrée, à Skikda. A ce propos, l'ancien bras droit du défunt général major Smaïn Lamari à l'ex-DGPS aurait probablement quelque embarras à expliciter la coïncidence entre sa présence à la rétribution de l'assassin présumé de Mécili et son statut d'officier de sécurité de la 5ème Région militaire dont Skikda dépend territorialement. Il serait d'autant moins à l'aise qu'il a lui-même reconnu le fait. Demeure enfin une énigme, le silence très assourdissant du chef du FFS dont Ali André Mécili était un des dirigeants historiques. Sur l'incrimination de Mohamed Ziane Hasseni et la délivrance de deux mandats d'arrêt contre le commanditaire et l'assassin présumés de l'avocat parisien, le leader historique du Front des forces socialistes semble avoir fait le jeûne de la parole personnelle. A sa place, la direction déléguée du parti a publié des communiqués à l'eau tiède sur l'affaire. Un peu surprenant quand on sait que le fondateur du FFS est un frère de combat et un ami intime de l'avocat assassiné. Encore étonnant quand on se souvient qu'il est l'auteur de l'Affaire Mécili, livre-réquisitoire, paru en 1989 en France, édité depuis en Algérie et réédité en France avec une postface de l'auteur. Pourtant, l'occasion était belle pour dénoncer les dérives de la police politique algérienne. Et rappeler aux oublieux que la démocratisation de l'Algérie n'a jamais été un… oued aussi tranquille que le lac Léman. N. K.