Si Mark Cavendish a survolé le sprint de la 21e étape pour signer sa 6e victoire et entrer dans l'histoire du Tour, Alberto Contador remporte pour la 2e fois cette 96e édition. Il a été épaté par le comportement de toute la foule qui l'a acclamé tout le long du parcours. Ses concurrents ont, en revanche, été éblouis par son coup de pédales dans les bosses. Il donnait l'impression de pouvoir accélérer à tout moment. Lorsqu'ils ont appris qu'il avait triomphé, personne n'a été surpris. «Sa victoire ne m'a pas étonné outre mesure. Ce garçon-là, c'est de la graine de champion, il a l'étoffe d'un vrai pro», s'est exprimé l'Américain Lance Armstrong. Le compliment de celui qui a remporté à de nombreuses reprises le Tour de France (7 fois consécutives) ira droit au cœur du jeune coureur espagnol. Il a donc tout le temps devant lui pour enrichir un palmarès de nature à captiver l'attention d'un directeur sportif d'une équipe professionnelle. Nous n'y sommes pas encore. Garçon réfléchi, bien conseillé, Contador refuse de brûler les étapes. «Ce qui m'arrive est formidable, pour ne pas dire exceptionnel. Jamais je n'avais songé à un tel doublé. J'ai vraiment été gâté. Gagner deux fois le Tour, comment imaginer un scénario pareil ?» Encore sous le coup de l'émotion, il sait désormais qu'il sera surveillé comme le lait sur le feu. Cela ne l'effraie pas outre mesure : «Je ne me prends pas la tête. En début de semaine, je suis en stage de trois jours puis, jeudi, un second stage sur la piste car je veux préparer du mieux possible le Championnat espagnol de poursuite.» Rouleur, sprinteur, celui qui s'était révélé en cyclo-cross a de l'appétit à revendre. Tout en dosant, nous l'avons dit, ses efforts, Alberto Contador est arrivé à Paris, le terminus de la 21e étape, tout aussi triomphant, bras levés vers le ciel. Une image symbolique de la suprématie de l'incontestable Contador, mais aussi de toute son équipe. L'ultime libération d'un champion placé sous haute tension par sa propre équipe depuis des mois. Intrinsèquement, le Madrilène était un cran au-dessus de tout le monde. Il ne pouvait être battu par qui que ce soit. Lui seul aurait pu se mettre en danger en cédant à la guerre psychologique imposée par son «coéquipier» Lance Armstrong et, à un degré moindre, par le manager de son «équipe» Astana. Contador a tenu bon et ce fut là son principal mérite. Car, sur la route, une fois arrivé sur son terrain de prédilection, la montagne, il s'est élevé sur des hauteurs où rien ne pouvait l'atteindre, pas même la pire des perfidies. Plus encore que du bonheur après cette deuxième victoire finale (à seulement 26 ans), l'Espagnol doit surtout ressentir un réel soulagement. «En 2007, j'ai gagné sur le physique. Cette année, c'était une combinaison entre le physique et le mental», a-t-il confié dans un bel euphémisme. Il attend ce rendez-vous de 2010 avec impatience. «Le niveau sera encore plus relevé. Je sais que les places seront chères. Si une opportunité se présente, j'essaierai de glaner un troisième succès.» Du talent, de l'ambition, le lauréat de la 96e étape a de bonnes raisons de croire en des lendemains qui chantent. «Il est certain que l'année prochaine je ne serai pas dans le même projet que Lance Armstrong, mais il est encore trop tôt pour se décider sur la nature de l'équipe dans laquelle j'évoluerai l'année prochaine. Entre Lance Armstrong et moi, la situation n'a pas beaucoup évolué pendant le Tour. Lorsqu'il était devant moi, il avait un peu plus le moral, mais quand cela a été mon tour, les choses allaient naturellement mieux pour moi. Je savais, en arrivant sur le Tour, que Lance visait le classement général, tout comme moi. Ce n'était pas une situation forcément compatible, mais je m'étais bien préparé pour cela. L'année prochaine, il sera sans doute dangereux. S'il est aussi fort que cette année, il sera un adversaire très sérieux», a confié l'Espagnol en conférence de presse. Qui l'eût cru ? Y. B.