Le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Leksaci, est un homme heureux. Il est à la tête d'une institution financière à la rigueur incontestable, pour l'instant. Peut-il pour autant s'en attribuer les mérites ? Mohamed Leksaci a livré devant le Sénat une multitude de données statistiques notables, au vert. Avec cent vingt-six milliards de dollars de réserves de changes, un surplus du compte courant extérieur amélioré, l'Algérie peut se prévaloir d'une bonne position financière extérieure. Toutes proportions gardées, elle est passée du tout au tout, ou presque. Le pays était dans le rouge au début des années quatre-vingt-dix ; il ne comptait dans son escarcelle que quatre milliards de dollars en devises. Il était en cessation de paiement, au bord du gouffre. Dans pareilles conditions, le recours au rééchelonnement de la dette extérieure était inévitable. Une déconvenue ? Un choix douloureux ? La restructuration de la dette, beaucoup la pensaient, à tort ou à raison, hypothétique. Elle s'est révélée, au final, salvatrice, car elle aura résolu plus de problèmes qu'elle n'en aura créé. Treize ans après, le fardeau de la dette, c'est fini. Résultat du remboursement par anticipation, l'encours d'une partie de la dette extérieure a été substantiellement réduit. En valeur, la dette extérieure a été ramenée à 4,889 milliards de dollars à fin 2007. Il faut dire que c'est un exploit dont peu de pays de la sphère sud peuvent se prévaloir dans le contexte actuel. La dette produisait des effets pesants, l'Algérie affectant une bonne partie de ses devises au service de la dette, des miettes à l'investissement productif. Aujourd'hui, changement de cap, la Banque d'Algérie effectue non seulement des placements rémunérés, mais instaure également un fonds de régulation à la manière de ce qui se fait dans beaucoup de pays pétroliers. De nouveaux instruments de collecte de l'épargne ont été mis en place quand bien même ils ne seraient pas suffisants. Expliqué autrement, le pays dispose de liquidités et la BA constitue une bonne adresse pour les partenaires étrangers. On sait que le pays a perdu une part importante de ses recettes douanières suite à la libéralisation du commerce extérieur opérée en 1995, et à l'entrée en vigueur de l'accord d'association que l'Algérie a signé avec l'Union européenne. Ses rentrées seront grevées davantage, une fois que l'Algérie aura adhéré à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Autres indices dans la politique monétaire et financière, la rentabilité des banques. Celle-ci est importante dans le privé. Elle l'est moins dans les banques publiques. En proportion, c'est 3,21% contre 0,84%. L'agrégat des crédits à l'économie est appréciable. Il correspond à 1 420,1 milliards de dinars. Une zone grise toutefois dans le tableau dressé par le gouverneur de la Banque d'Algérie : l'inflation. Elle a repris. Le taux était de 5,63% à fin mars, et de 6,44% à fin avril, une hausse liée à l'augmentation des prix des produits alimentaires. Conjuguées ou prises séparément, ces indications attestent, de manière globale, un bon équilibre des tendances financières et monétaires, dans un contexte international favorable, faut-il le noter. La bonne tenue des marchés pétroliers est à l'origine de l'aisance financière dont jouit le pays. Mais aussi dans une conjoncture marquée par une forte expansion monétaire et de reprise de l'inflation en 2007. La BA est ainsi appelée à résorber l'excès de liquidités, à mettre plus de rigueur, plus de flexibilité dans la conduite des mécanismes, des leviers de la politique monétaire et financière. Ajoutés à une croissance soutenue, ces indices au vert, dans l'ensemble, sont de nature à impulser une nouvelle dynamique à l'économie nationale. Cependant, une question, l'Algérie réussira-t-elle à atteindre une croissance plus élevée, des performances plus étendues ? Parviendra-t-elle à maintenir cette bonne tendance, à faire accélérer la cadence des réformes, à améliorer le climat des affaires ? Attendons pour voir. Y. S.