Photo : Rahmani Entretien réalisé par notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani LA TRIBUNE : Dernièrement, votre entreprise a organisé à Annaba les Podiums de Fertial, c'est la première fois que cela arrive depuis 2005. Quels sont les objectifs visés par cette manifestation ? Jorge Requena Lavergne : C'est avant tout communiquer, faire connaître ce que Fertial a fait et ce qu'elle est en train de faire. Nous sommes restés silencieux trop longtemps ; pourtant beaucoup a été fait depuis 2005, des investissements ont été réalisés aussi bien dans les équipements que dans la formation mais aussi en matière de sécurité. C'est ce qui nous a permis d'atteindre des niveaux de production appréciables. Justement en parlant de production, selon les capacités installées, peut-on dire que le niveau actuel est satisfaisant ou alors serait-il en deçà de ce qu'il devrait être ? Vous savez, les capacités changent par le fait des investissements consentis, cela ne se fait pas du jour au lendemain, il faut passer la commande, fabriquer ces équipements, les transporter, les dédouaner, les mettre en place et les mettre en service. Toutefois, je peux dire que, pour le complexe de Annaba, nous avons atteint les 280 000 tonnes d'ammoniac et les 180 000 tonnes d'engrais ; pour les 2 complexes réunis, nous en sommes à 632 000 tonnes rien que pour l'ammoniac. Nous comptons augmenter la production pour atteindre les 900 000 tonnes de ce dernier produit et 300 000 tonnes d'engrais. En augmentant la production, ne craignez-vous pas qu'il y ait des accidents, les capacités installées ne le permettant peut-être pas ; y a-t-il eu un audit à ce sujet ? Il n'y a pas eu d'audit tel que vous l'entendez, nos équipes savent ce qui doit se faire ou être entretenu. A la reprise en 2005, il y a eu un bilan de fait. On savait ce qu'il fallait faire mais il y avait des choses qu'on ne savait pas et qu'on découvrait au fur et à mesure et on y apportait les solutions adéquates. Il y a eu une amélioration indéniable en matière de sécurité et les accidents ont été sensiblement réduits. En 2004, il y a eu plus de 200 accidents, dont 2 mortels ; en 2005, il y en a eu 220 et en 2009 seulement 50. Ces résultats ont été possibles grâce aux investissements dans des moyens techniques plus performants et à la formation dont ont bénéficié nos équipes de production et d'intervention. Le taux de gravité des accidents était en 2004 de 5,3% ; aujourd'hui, il se stabilise autour de 0,027% ; le taux de fréquence est passé de 14,5% en 2004 à 2,8% en 2009. Vous parlez à chaque fois des investissements. De quel ordre sont-ils et que concernent-ils exactement ? A la reprise d'Asmidal en 2005, il était prévu d'investir 167,5 millions de dollars. Ce chiffre est largement dépassé aujourd'hui, puisque Fertial a injecté plus de 180 millions de dollars. Cet investissement a concerné la formation, l'outil de production, la recherche, l'environnement, la sécurité, les infrastructures, les installations de charge, de stockage et celles dites auxiliaires. Concernant le premier point, où en est-on avec le centre de formation que devait construire Fertial et qui était prévu dans le contrat de reprise ? Les centres de formation existent déjà dans plusieurs régions d'Algérie ; les instituts d'agronomie dépendant du ministère de l'Agriculture sont utilisés pour la formation de techniciens et d'ingénieurs avec l'accord de ce département. Il s'agit pour nous de ne pas disperser les moyens et d'exploiter ce qui existe déjà. La formation se fait au niveau de ces centres selon un programme arrêté et tout se déroule comme prévu. Et pour ce qui est du fameux laboratoire d'analyse, lui aussi prévu par le contrat ? Il est opérationnel et a déjà procédé à plus de 1000 analyses gratuites des sols demandées par les agriculteurs de la région. Ce laboratoire est très utile dans la mesure où nos ingénieurs et techniciens conseillent les professionnels de l'agriculture sur le type de culture à entreprendre selon l'analyse du sol et sur le type de fertilisant qu'il faut employer pour avoir un meilleur rendement. Vous écoulez la totalité de la production de fertilisants sur le marché national et selon nos informations, vos bénéfices sur ce produit sont infimes. Comment faites-vous pour équilibrer vos recettes ? Effectivement, nous vendons la totalité de notre production de fertilisants sur le marché intérieur que nous couvrons à hauteur de 80% et nous avons une marge de 4%, ce qui est très insuffisant. Nous sommes tenus de respecter le contrat de reprise qui nous oblige à vendre exclusivement ce produit en Algérie et nous faisons tout notre possible pour promouvoir l'utilisation des fertilisants auprès des agriculteurs. Nos conseillers sillonnent l'Algérie pour convaincre les professionnels de l'agriculture d'utiliser les fertilisants pour un meilleur rendement. Il faut aussi signaler que l'action du ministère de tutelle a, par les mesures incitatives mises en place, amené les fellahs à utiliser ces produits. Pour ce qui est de la petite marge (4%) qui demeure très insuffisante, nous nous rattrapons sur l'ammoniac que nous exportons à hauteur de 80% vers l'étranger, essentiellement vers les pays européens. Actuellement, il y a une demande assez importante mais on ne sait pas exactement comment évoluera le marché parce que cela dépend de plusieurs paramètres. En parlant de marché européen, les produits de Fertial sont-ils de qualité et peuvent-ils être compétitifs sur le plan international ? Nos produits sont de qualité, ils répondent aux normes internationales et nous nous employons à les développer encore plus. Actuellement, nous nous préparons à la certification ISO 14001 qui sera obtenue fin 2010. Nous attendons beaucoup de cette certification à laquelle nous travaillons depuis le début de l'année 2009. Cela va apporter un plus au prestige de Fertial mais aussi aux villes voisines en matière de respect de l'environnement. C'est un gage de qualité qui va servir l'entreprise ; cette certification, nous n'aurions pas pu l'obtenir si nous avions voulu le faire en 2005 parce que nous n'y étions pas préparés sur les plans technique et humain. Aujourd'hui, c'est le cas puisque tout est prêt et que les personnels ont été formés dans ce sens. Il nous reste la certification OHSAS 18001 à laquelle nous nous préparons activement et que nous décrocherons en décembre 2011. M. R. Jorge Requena Lavergne en bref Né en 1962 à Barcelone où il a fait ses études secondaires dans un lycée français, il décroche en 1988 et 1991 deux diplômes de l'Ecole supérieure de commerce dans cette même ville pour occuper plus tard le poste de directeur général de l'entreprise Pablo Richi spécialisée dans la pâte à papier, la chimie et les fournitures industrielles. Après une solide formation en marketing industriel à l'ESADE de Madrid en 1997, il est encore une fois directeur général au niveau du groupe français Metalimpex Iberica en Espagne. En 1999, il est en poste, occupant les mêmes fonctions, en Turquie au sein de l'entreprise Bamesa Celik ; en 2003, il est affecté en France comme directeur général de Bamesa Cofrafer et, en 2005, il suit une formation à Harvard Business School en building competitive advantage through operations. En septembre 2009, il est nommé à la tête de Fertial comme administrateur directeur général.