De notre correspondant à Paris Merzak Meneceur La France a-t-elle tourné la page de sa politique faite de pragmatisme lors de la tentative de libérer un de ses citoyens pris en otage par des terroristes islamistes ? La question mérite d'être posée après la confirmation par le président Sarkozy de la mort de Michel Germaneau, ce Français pris en otage par AQMI le 19 avril au Mali.Dans son intervention solennelle d'hier matin, le chef de l'Etat français a déclaré avec force : «Plus que jamais, nous sommes décidés à lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes et à soutenir les pays qui ont le courage de combattre ce terrorisme barbare.» La traduction pratique d'un tel engagement signifie que le combat contre le terrorisme est sans concession et sans compromis et qu'il n'y a pas de dialogue avec un tel ennemi. Il n'est pas question de céder à son chantage en prenant lâchement en otage un simple citoyen français.Or, dans le passé, la France n'avait pas toujours eu cette doctrine. Elle traitait les affaires de prise d'otage au cas par cas, n'excluant pas, contrairement aux Britanniques et aux Américains, de négocier avec les terroristes, parfois au prix fort, la libération d'un de ses ressortissants. Le cas le plus récent est celui de Pierre Camatte, 61 ans, kidnappé le 25 novembre 2009 au Mali. La France avait engagé des négociations avec ses ravisseurs d'AQMI. Camatte a été relâché en février contre la libération de quatre prisonniers islamistes au Mali et le versement d'une rançon. On se souvient que cet épilogue avait soulevé le mécontentement de plusieurs pays de la région, dont l'Algérie, pour qui on ne négocie pas avec les terroristes et on ne cède pas à ses exigences.Le cas de Michel Germaneau s'est présenté autrement et ne permet pas de savoir si la France a tourné le dos à son pragmatisme avec les preneurs d'otages. C'est que AQMI ne lui a pas donné l'occasion malgré sa déclaration du 6 mai où elle demandait «à la France et à ses alliés dans la région la libération de ses détenus». Face à des informations circulant à Paris sur ses revendications, comme la libération d'un haut responsable terroriste détenu en Algérie, le ministère français des Affaires étrangères a réagi le dimanche 25 juillet : «Depuis l'enlèvement de notre compatriote, les ravisseurs, en dépit des efforts des autorités françaises, ont refusé tout dialogue et n'ont formulé aucune revendication précise.» Peu-être parce que, thèse non exclue à Paris, Germaneau, cardiaque, sans traitement depuis le 18 juin, serait déjà mort depuis plusieurs semaines et qu'il n'y avait plus rien à négocier. Quelle aurait été l'attitude de la France si les ravisseurs avaient accepté le dialogue pour obtenir la libération de son citoyen ? Personne ne peut le savoir. Et cela ramène à la déclaration de Sarkozy. Mais, à partir de celle-ci, peut-on déduire que Paris a décidé de ne plus négocier avec les terroristes, de ne plus céder à leurs revendications ? C'est aux autorités françaises de préciser si leur politique en la matière a vraiment changé ou si c'est une posture de circonstance. La première thèse pourrait prévaloir si on ajoute que Sarkozy a déclaré aussi que la mort de Germaneau «ne restera pas impunie», sans donner de révélations quant au contenu et la forme de la punition.