C'est à l'occasion de la commémoration du 13ème anniversaire de l'association artistique du cinéma Lumières que le long métrage Archipel de sable, de Ghouati Bendeddouche, a été projeté jeudi dernier en avant-première à la salle Sierra Maestra d'Alger. Produit en 2007 dans le cadre de la manifestation «Alger, capitale de la culture arabe», le film retrace la rencontre de deux hommes, de deux cultures, dans un espace, le désert. En quête d'inspiration après avoir sillonné l'Europe, Jean Berthier, jeune artiste peintre français, se rend au village d'Ouled Nasser, à Biskra. Nous sommes en 1939, cette partie du Sud algérien n'est qu'une zone militaire que dirigent les colons français. Jean, artiste pacifiste, reste loin des conflits et se lie d'amitié avec Si Gacem, chef d'une confrérie religieuse. A ses côtés, il découvrira une autre facette de ceux qu'on traite d'indigènes. Se nourrissant de spiritualité et de dignité transmise par Si Gacem, le jeune Jean fusionne avec sa nouvelle communauté sous les regards suspicieux, voire hostiles, des autorités françaises. C'est une grande histoire d'amitié qui commence. Jean découvrira la tolérance et la simplicité des Algériens du Sud. Pendant ce temps, l'armée française commence à négocier un plan pour contrôler la région et en faire une véritable base militaire, avec la complicité du caïd. Si Gacem, homme de foi, tente avant tout de calmer les esprits des villageois qui veulent se révolter. En vain. La révolte éclate. Si Gacem est fusillé par les colons. Dès lors, Jean Berthier se retrouve face à un véritable conflit interne, existentiel : ses concitoyens ont tu la voix de la raison, de l'humanisme, pour laisser parler les armes, dirigées contre ces autres êtres humains qu'il a appris à connaître, à aimer et qui l'ont adopté. Qui a raison, qui a tort ? Choisira-t-il sa «mère» aux dépens de «la justice», comme le fera plus tard un auteur Français qu'on veut nous faire passer pour un «ami de l'Algérie» ? D'une durée de 1h40mn, Archipel de sable est d'abord un texte très philosophique signé Mourad Boureboune où l'âme humaine est mise à nu. Le scénariste soulignera avec génie les paradoxes qui existent en l'homme. C'est aussi une histoire épique où l'homme se retrouve simple acteur, un pion, guidé par sa destinée, jouant un rôle dans un décor qu'il croit avoir choisi, mais qui, au final, n'est que des pages d'un scénario dont il n'est pas l'auteur. Le scénariste s'est probablement inspiré de la vie du peintre orientaliste Etienne Dinet qui s'était établi à Boussaada où il avait embrassé l'islam et pris le nom de Nasserddine Dinet.On notera l'excellente direction d'acteurs avec, dans le rôle de Si Gacem, Hamid Remass et Emmanuel Texeraud dans le rôle de Jean Berthier. Le film, dont le directeur photo n'est autre que Allel Yahiaoui, a été tourné dans des extérieurs sublimissimes à Biskra et à El Oued. On relèvera toutefois quelques imperfections dans les effets spéciaux. «Nous avons beaucoup souffert pour finaliser ce film vu les soucis financiers auxquels nous avons fait face», dira Hamid Remass, essayant d'expliquer les petites faiblesses du film. Rappelons que le réalisateur était absent lors de cette avant-première pour des raisons de santé. W. S.