Près de sept millions d'électeurs ont voté hier dans le calme au premier tour d'une présidentielle qui doit permettre d'entamer le redressement et la réconciliation du Mali. Dans les villes du Nord, telles que Kidal, Gao et Tombouctou, bastion de la rébellion et des groupes armés, le vote s'est tenu sous la surveillance de casques bleus de la force de l'ONU, la Minusma, et de l'armée malienne. En effet, malgré un semblant retour au calme, le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'ouest (Mujao), un des groupes armés qui ont occupé le Nord, a menacé samedi dernier, de «frapper» les bureaux de vote et tenté de dissuader «les musulmans maliens» de prendre part au scrutin. Mais, aucun attentat n'a été enregistré dans la journée d'hier et les Maliens se sont rués sur les bureaux de vote pour choisir l'un des 27 candidats à la présidentielle. A Bamako, dans un centre de vote, plusieurs centaines d'électeurs attendaient de pouvoir voter avant l'heure d'ouverture des bureaux à 10 heures. Plusieurs Maliens ont affirmé aux envoyés spéciaux des agences qu'ils étaient fatigués de la mauvaise gouvernance. «J'espère qu'avec ma voix mon candidat sera élu et pensera surtout à développer le pays.» Au nord, le vote a démarré en retard et plusieurs électeurs n'ont pas trouvé leurs noms sur les listes. Il s'agit-là des irrégularités qui avaient poussé, rappelons-le, le 28e candidat à la présidentielle, Tiébilé Dramé, artisan en juin d'un accord de paix entre Bamako et la rébellion touareg, à se retirer de la course. Dramé avait demandé le recul de la date du scrutin vu que le fichier électoral est obsolète et que seulement 16% des habitants du nord ont eu leur carte pour voter. «Le premier problème qu'on note vingt minutes après le début des opérations, c'est que le travail d'identification n'a pas été fait. Des électeurs ne savent pas où ils vont voter», a constaté un observateur national. Et si une partie de la population touareg du nord n'a pas réussi à voter à cause de l'inexistence des fichiers de vote, l'autre partie, quant à elle, a rejeté le scrutin. A Kidal, à titre d'exemple, femmes, enfants et jeunes brandissant les drapeaux des rebelles touareg se sont réunis devant «l'arbre de la contestation» et ont brandi des banderoles dont l'une proclamait «53 ans de crimes de l'armée malienne, cela suffit». «On ne veut plus du Mali, on n'en a jamais voulu. Les élections, ce n'est pas notre problème, c'est seulement les pro-maliens qui vont voter, aucun de nous ne va voter pour le Mali», a assuré parmi la foule, une militante du Mnla. «Notre seul désir, c'est l'indépendance de l'Azawad. Le Mali a tué nos parents, nos enfants, nos frères, même nos troupeaux. On veut en être délivrés», a-t-elle demandé. Malgré toutes ces imperfections, les Maliens se sont dirigés vers les bureaux de vote car ils misent beaucoup sur ce scrutin qui doit permettre d'entamer le redressement et la réconciliation de leur pays secoué par 18 mois de crise politique et militaire. «C'est mal organisé, on ne sait pas comment il faut voter. Mais il faut voter. La population souffre, nous n'avons pas d'eau, pas d'électricité, il nous faut un président pour s'occuper de tout cela», disent les Maliens. H. Y.