Djanet est assurément une région touristique par excellence. Elle est réputée pour cela. Grâce à des sites d'une extraordinaire beauté et une nature des plus envoûtantes, elle recèle des atouts touristiques inestimables mais, hélas ! non entièrement exploités. Après des années d'inertie imposée par une conjoncture sécuritaire pénalisante, l'activité touristique dans le Grand Sud algérien reprend de plus belle. On est encore, certes, loin des flux ininterrompus d'étrangers arrivant dans cette région durant les décennies 70 et 80, mais l'engouement suscité par les attraits uniques Djanet, Tamanrasset ou encore Timimoun, augure d'un retour très envisageable à cette période bénite où l'Algérie figurait en bonne place sur les prospectus des agences de voyages étrangères. Ce dynamisme allant en augmentant, Djanet a accueilli pour les seuls mois d'octobre et novembre 2008 plus de 1 000 touristes étrangers, se félicitent les responsables locaux en charge du tourisme. Et ce n'est que le début de la saison touristique, laquelle doit s'étaler jusqu'à avril, le pic étant attendu vers la fin décembre à l'occasion des festivités de fin d'année. En cette fin octobre et début novembre, notre séjour à Djanet avait coïncidé avec celui de l'ambassadrice d'Autriche en Algérie qui témoigne : «J'aime le Sud, il y a beaucoup de choses à découvrir, les danses, la signification des gestes. Djanet est spéciale, je dis toujours à mes amis que l'Algérie est vraiment un pays à visiter. Cela est aussi le travail de ma collègue à Vienne, l'ambassadrice d'Algérie, Mme Ferroukhi.» La présence de la diplomate avait également concordé avec la libération des otages autrichiens, ce qui lui fera dire ceci : «Le nombre de touristes autrichiens en Algérie n'est pas important. Peut-être qu'avec le dénouement de cette affaire des otages, les choses iront mieux.» Du pain béni donc pour les 26 agences touristiques activant à Djanet, sur un total de 32 réparties dans toute la wilaya d'Illizi. Autant d'agences qui emploient des dizaines d'habitants de la ville et d'ailleurs, y compris des étrangers venus de quelques pays d'Afrique, aussi bien dans le cadre de l'immigration légale que celle illégale. Si l'afflux des touristes est encouragé, à travers notamment les charters reliant directement les villes européennes à celles du Sud, l'activité touristique ne pourra connaître son réel essor si le problème des infrastructures, actuellement trop insuffisantes à Djanet, n'est pas pris en charge. Il n'y a, en effet, que deux hôtels qui ne répondent plus aux normes minimales d'hygiène et de confort, et seulement trois villages touristiques, dont la capacité d'accueil totale demeure limitée. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les touristes étrangers qui séjournent en ville ne constituent pas des rentrées d'argent pour les nationaux : ils viennent généralement à Djanet en escale, le jour de leur arrivée ou de leur départ, l'essentiel de leur séjour étant programmé sur les différents sites du parc du Tassili. A Djanet, ils dépensent très peu. De plus, ils s'arrangent pour ramener de leur pays d'origine tout ce qui peut être transporté en denrées alimentaires et autres besoins pour dépenser le moins possible. Ce qui fera dire à certains habitants que «les étrangers font du tourisme chez nous presque gratuitement.» D'autant que, contrairement aux autres pays, les droits d'entrée au parc demeurent insignifiants (100 DA depuis 1968 !). L'activité touristique allant de pair avec l'artisanat, le développement de la première profiterait à celui-ci, si les concernés ne trouvaient pas à redire s'agissant de la politique nationale du secteur pour encourager ces métiers, lesquels sont confrontés à de multiples problèmes. Ils sont plus d'une soixantaine à vivre et à faire vivre leur famille de ce savoir-faire en péril, essentiellement en raison de la cherté des matières premières. Se répercutant sur le prix final du bijou, les artisans ont du mal à écouler leur marchandise. Le kilo d'argent a atteint 50 000 DA et un bout d'ébène est cédé à 1 000 DA. Même leur doyen, Salah Tikaoui, qui détient plus de 37 ans d'expérience dans le métier, est confronté aux mêmes contraintes. «J'ai de la marchandise qui remonte à trois ans, il faut que les autorités en charge du tourisme et de l'artisanat fassent quelque chose pour sauver cet artisanat.» Si Salah a au moins la chance d'avoir sa boutique en plein centre-ville, le reste des artisans est rassemblé dans un pavillon du marché, situé à la périphérie de celle-ci, sur le site appelé El Oued. Ils y vendent leurs produits dans des conditions précaires, dans des baraques de fortune et sans électricité, une mesure qui a été prise pour éviter les masses. «Il y a un infime pourcentage de touristes étrangers qui passent par ici, le reste, ce sont des nationaux qui achètent rarement en raison de la cherté des produits», se plaint l'un des artisans. M. C.