«Benkari, ‘‘le Cow-boy'', a marqué un doublé en finale». Sixième coupe (1990) : «Il ne manquait que ce trophée à la génération 90» . Al Hadj Abdallah Matem est l'un des personnages liés à l'histoire de l'Entente de Sétif qu'il n'a pas quittée depuis sa création. Il a gagné quatre fois la Coupe d'Algérie en tant que joueur dans les années 1960, et une fois en tant que président du club en 1990. La mémoire vivante du club phare des Hauts Plateaux nous raconte, ici, ses meilleurs souvenirs lors des trophées qu'il a gagnés mais aussi ceux auxquels il a assisté comme spectateur, dont le dernier brandi par le capitaine d'équipe, Delhoum. Premier trophée (1963) : «ESS-USMA en demi était une finale avant l'heure» «Parmi les matchs les plus difficiles que son équipe a disputés en cette première édition de la Coupe d'Algérie, celui contre l'USMA en demi-finale au stade Benabdelmalek de Constantine où l'Entente a été menée au score 2 à 0 dans les 23 premières minutes de jeu. La plupart des supporters sétifiens avaient quitté le stade en deuxième période, persuadés que l'ESS était éliminée. Ce n'est qu'en arrivant à Sétif qu'ils se sont rendus compte que l'Entente avait renversé la vapeur (4-2), après prolongations. Le fait d'éviter l'USMA en finale était une bonne chose pour Sétif, car une finale entre les deux équipes aurait pu virer au cauchemar vu la rivalité qui existe entre les supporters des deux formations.»
Deuxième trophée (1964) : «En 64, les choses étaient faciles pour nous jusqu'en demi-finale où on a affronté pour la deuxième fois l'USMA, mais au stade 20-Août cette fois. C'était également une finale avant l'heure. J'étais en première année seniors et j'étais impressionné par la qualité des joueurs que possédait l'USMA. J'ai demandé à l'entraîneur El Hadi Benmahmoud de ne pas compter sur moi pour ce match. Ce dernier a refusé et m'a demandé, je m'en souviens bien jusqu'à ce jour : «N'aie pas peur mon fils, c'est toi qui leur donnera du fil à retordre.» Je ne pouvais même pas nouer mes lacets. Deux dirigeants se sont chargés de le faire. Alors que le score était de 2 à 2 jusqu'aux dernières minutes du match, j'ai marqué le troisième but qualificatif sur un centre de Messaoudi qui a terminé le match blessé.» «Benkari, ‘‘le Cow-boy'', a marqué un doublé en finale» «En éliminant l'USMA, on était favoris pour gagner la finale contre le MOC. Nous l'avons emporté sur le score de 2 à 1. Dans la matinée, j'ai rencontré Rachid Benkari qui m'a raconté un rêve étrange. Il s'est vu comme un cow-boy, qui a descendu deux individus avec son pistolet comme dans les films Western. Il a marqué deux buts lors de la finale. Ce qui explique son rêve.» Troisième trophée (1967) : «La finale a failli être annulée à cause de la guerre des Six jours» «La finale de 1967 a coïncidé avec la guerre israélo-arabe des Six jours. La défaite des Arabes a été tellement amère qu'on songeait à annuler la finale de la Coupe d'Algérie. Le défunt Houari Boumediène a finalement ordonné son déroulement.» «Kermali a demandé de jouer à ma place» «Lors de cette saison, les relations n'étaient pas au beau fixe avec Kermali qui était joueur et entraîneur en même temps. Il ne me faisait pas confiance lors des derniers matchs. Le jour de la finale, il est venu me parler en aparté. J'étais étonné,et je me suis demandé ce qu'il allait me dire. ‘‘Toi, tu es encore jeune et tu as tout l'avenir devant toi. Ce n'est pas le cas pour moi, c'est ma dernière saison en tant que joueur (il avait 37 ou 38 ans). Je te demande donc de jouer à ta place avec ton accord'', m'a-t-il demandé. Je lui ai répondu que je n'avais pas discuté ses choix dans les matches précédents et qu'il devait prendre la responsabilité de ses décisions.» Quatrième trophée (1968) : «Cette finale contre le NAHD était la meilleure de toutes» «Cette saison-là, on a remporté le doublé, mais ce n'était pas une saison sans problème. Cette finale contre le NAHD est la meilleure finale dans l'histoire du football algérien. L'Entente l'a emporté sur le score de 3 à 2, après prolongations. On était les premiers à marquer par l'intermédiaire de Messaoudi, avant que le NAHD égalise et prenne l'avantage. Dans les dernières minutes de jeu, Bouyahi a trompé son propre gardien et a marqué contre son camp. On s'est imposés à la fin après prolongations grâce au deuxième souffle.» «J'ai offert la balle du troisième but à Salhi» «Dans l'action du troisième but, je me suis présenté seul devant le gardien adverse sur le côté droit. J'avais la possibilité de marquer seul ce but, mais j'ai préféré servir sur un plateau d'argent Abdelhamid Salhi qui a marqué le but de la victoire. Je ne voulais pas me montrer égoïste sur cette action.» «On était solidaires avec Aribi» «La fin de la saison n'a pas été paisible. La direction du club a décidé de limoger l'entraîneur Mokhtar Aribi, accusé de vouloir arranger le match de championnat contre le MOC qui a précédé la demi-finale de la Coupe d'Algérie. On était solidaires avec l'entraîneur qui n'avait rien à voir avec ce match perdu sur le terrain. On a refusé la décision de la direction qui a fini par démissionner. Aribi a continué sa mission avec nous et nous avons gagné le doublé.» Cinquième trophée (1980) : «J'ai suivi la finale sur le petit écran» «En 1980, à l'époque de la réforme sportive, je n'étais pas membre du bureau, puisque l'équipe était sous la tutelle de Sonatrach et se dénommait l'Entente Pétroliers Sétifienne. Lors de cette finale, je ne me suis pas déplacé au stade, même si un grand nombre de supporters se sont déplacés de Sétif. Comme j'avais peur que l'Entente perde, j'ai suivi ce match sur le petit écran.» «Avec la JSK et le Mouloudia» «La Coupe gagnée en 1980 est la seule qu'on a remportée à l'époque de la réforme sportive. En 1977, lors de la promulgation de la loi sur la réforme sportive et le rattachement des clubs aux sociétés, trois clubs se sont opposés. La JSK, appelée à l'époque Sari Jamiat Kawkabi, le Mouloudia et l'Entente. On a refusé de céder les clubs aux sociétés, comme demandé par l'Etat. On a multiplié les réunions entre nous, et nous avons refusé que nos clubs deviennent comme «Souk El Fellah» à l'époque. On n'a pas voulu céder, et le jour où j'ai rencontré le défunt Bellamane, qui était dirigeant du MCA et maire d'Alger-Centre, on a discuté du sujet à la fin de la réunion avec la FAF. Il m'avait dit que le président de la République de l'époque, le défunt Boumediène, avec qui il s'est réuni, était au courant de notre position qu'il considère comme une rébellion contre l'Etat.» Sixième coupe (1990) : «Il ne manquait que ce trophée à la génération 90» «Après avoir goûté au trophée de Dame Coupe quatre fois en tant que joueur, et une fois en tant que supporter, je suis devenu président du club en 1989, l'année où les clubs se sont détachés des sociétés et revenues à l'ancien système. J'ai été élu président du club lors de la première opération de vote au sein des clubs. En cette époque, la coupe s'est jouée au cours de deux saisons. Lors de la saison 1988/1989, on s'est qualifiés pour les quarts de finale avant qu'on prenne la décision de la reporter pour la saison d'après. L'ESS de cette époque était représentée par la génération des Osmani, Boulahdjilet, Adjissa, Serrar, Zorgane, les frères Bendjaballah... Après avoir remporté la Coupe d'Afrique, le championnat, la Coupe afro-asiatique, il ne manquait que la Coupe d'Algérie pour compléter le palmarès.» «Benboulaïd a menacé de boycotter la finale» «Cette finale de la Coupe d'Algérie a coïncidé avec les difficultés rencontrées par notre pays sur le plan politique. Une réunion a eu lieu avec le président de la FAF, Omar Kezzal, le président du CAB, Benboulaïd, et moi-même en tant que président de l'ESS. Le CAB s'est plaint de le priver de l'accession, et le fils du chahid Benboulaïd a menacé de boycotter la finale en signe de protestation. Le défunt Kezzal avait demandé mon avis sur la possibilité de reporter le match mais j'ai refusé. Mon équipe était déjà à Alger, et les supporters ont commencé déjà à affluer au stade, 24 heures avant le coup d'envoi. Je leur ai dit que si le match n'a pas lieu, je ramènerai un huissier de justice pour qu'il note tous les dommages causés par ce report. On est convenu à la fin de jouer la finale à sa date initiale. Une rumeur d'un attentat à la bombe au stade 5-Juillet a circulé la veille du match. Les forces de l'ordre sont venues passer au peigne fin le stade olympique.» Septième trophée, (2010) «Pendant 20 ans, chaque élimination en Coupe d'Algérie était un coup dur pour moi. En 2010, nous avons renoué avec la joie de Dame Coupe, contre le CAB encore une fois. Ces dernières années, je ne peux plus suivre les matches tellement je suis stressé, je me contente de suivre les scores à la radio.» Huitième trophée (2012) : «La coupe aime l'Entente» «Avec ce huitième sacre, l'Entente le record des Coupes d'Algérie. Entre l'Entente et Dame Coupe, il y a une grande histoire d'amour. Il y a un contrat de location entre les deux depuis l'Indépendance. Le plus important est de perpétuer la tradition de l'Entente en coupe. J'ai eu les larmes aux yeux lorsque j'ai appris la victoire de l'Entente et le retour de ce trophée à Sétif.»