A l'entraînement, il faisait exactement ce que je lui demandais. Il prenait la profondeur et tu te disais : 'ça y est, il a compris, au prochain match, il va nous amener ça" Cette phrase, attribuée à Raymond Domenech au sujet de Nicolas Anelka, est l'un des temps forts du "Livre Noir des Bleus", ouvrage paru sous la signature de Vincent Duluc. Un document qui apporte de nombreux éclairages et taille en pièce le mythe d'une grève décidée collégialement. Grand reporter à L'Equipe depuis 1994, chroniqueur des grandeurs et des décadences de l'équipe de France dans les colonnes du quotidien quasiment depuis cette date-là, Vincent Duluc apporte à ce dossier, en plus de sa plume et de sa profondeur d'analyse, pas mal d'éléments factuels nouveaux. On y trouve notamment une très longue confession de Robert Duverne, à la première personne, sur le différend qui l'a opposé à Patrice Evra au départ de l'action et, plus largement, sur la façon dont il a vécu l'ensemble de cette journée du 20 juin. A ce jour, l'incongruité des événements échappe encore à l'ancien préparateur physique. Il ne comprend toujours pas comment les joueurs ont pu s'oublier dans de pareilles proportions. "Ils étaient maraboutés" a lâché à l'auteur du livre un témoin de la scène. Mais Duverne a l'honnêteté de reconnaître qu'il était raccord avec l'air du temps : "J'essaie de le convaincre. Je suis revenu sur moi. C'est égoïste de ma part. Je lui dis que j'ai fait beaucoup de sacrifices pour cette Coupe du monde." Ce livre, dans un chapitre entier, ne laisse aucune chance de s'en sortir à l'auteur des insultes proférées à l'encontre de Raymond Domenech à la mi-temps de France - Mexique : Nicolas Anelka, l'étincelle qui allait tout embraser. Le joueur de Chelsea - où il exerce son rôle d'attaquant de pointe avec plus de discipline - y apparaît comme un pyromane assumé, du début à la fin, jusqu'au mot d'adieu qui a embobiné les vingt-deux autres ("j'espère que vous allez faire quelque chose pour moi"). Quasiment comme un marionnettiste encore plus fort que Raymond Domenech dans l'art de jouer au lego avec les sentiments des autres. Vincent Duluc cite cette phrase "off" de l'ex-sélectionneur, sur laquelle il s'autorise une prescription. "A l'entraînement, il faisait exactement ce que je lui demandais. Il prenait la profondeur et tu te disais : 'ça y est, il a compris, au prochain match, il va nous amener ça'. Et au prochain match, il recommençait à décrocher... Parfois je me dis qu'il m'a manipulé."