«Le joueur le plus complet, celui qui sait tout faire, c'est Wayne Rooney» L'attaquant de l'OGC Nice entame un nouveau challenge. Arrivé sur la Côte d'Azur au mercato hivernal après six mois sur le banc des Girondins de Bordeaux, David Bellion souhaite montrer qu'il est toujours un buteur de haut niveau. Il revient sur ses expériences passées et livre un avis partagé sur ses passages à Bordeaux et Manchester United. Vous venez de jouer plusieurs matches avec Nice. Ça fait du bien de retrouver du temps de jeu ? Depuis mon arrivée, mes résultats personnels avec l'OGC Nice sont moyens. Je suis conscient que je peux faire mieux mais pour cela je dois encore progresser physiquement. Je le vois dans mes touches de balle, dans mes accélérations, il me manque un petit peu de puissance. En revanche mentalement, je suis vraiment à 100%. Bien sûr, j'aimerais marquer le plus vite possible mais je ne pense pas que la solution consiste à se dire en permanence : «Pourvu que je marque, pourvu que je marque.» J'ai été pris en tant que joker, c'est vrai, je n'ai pas marqué depuis presque un an, c'est vrai mais c'est aussi dû au fait que je n'ai pas joué depuis près d'un an. Cela faisait longtemps que je n'avais pas enchaîné sept matches d'affilée, cela fait du bien. ça fait un mois et demi que je suis là, je suis en train de digérer la préparation physique, j'espère que les résultats vont se faire sentir rapidement et planter à nouveau un peu plus de buts. Pourquoi avoir choisi Nice ? C'est un club où vous vous sentez bien (Bellion a déjà joué au club entre 2006 et 2007, ndlr) ? J'ai tout lâché pour venir ici parce que j'aime bien l'entraîneur, j'aime bien le club. J'ai refusé certains clubs. J'attendais qu'Eric Roy se manifeste et lorsque cela a été le cas, je n'ai pas réfléchi deux secondes. Tout s'est fait très très vite. Je n'ai jamais été quelqu'un d'obnubilé par l'argent, je pense qu'à un moment donné lorsqu'on a assez d'argent pour vivre, on est déjà heureux. Je suis mal placé pour me plaindre. Le fait de penser comme ça m'a permis de partir dans ce club qui est peut-être moins huppé que beaucoup d'autres mais qui a une âme. On dit d'Eric Roy qu'il est polyvalent, moderne. Quel type d'entraîneur est-il ? C'est quelqu'un qui sent le jeu, le football d'aujourd'hui. Il privilégie l'échange et forcément dès qu'il y a de l'échange, on avance mieux. Il connaît très bien le club, il y a des joueurs qui deviennent entraîneurs qui sont plus des combattants, Eric Roy lui a toujours été intelligent. C'est quelqu'un qui fait attention à son image, il est toujours bien habillé, on sent vraiment qu'il prend son métier très au sérieux. Il maîtrise bien les entraînements. Avec de telles méthodes, c'est malheureux qu'on soit que 17e. Mais je pense qu'on va se ressaisir. Quelles différences ressentez-vous avec Jean Tigana ? Vos relations n'étaient pas au mieux avec lui ? Expliquez-nous pourquoi ? Quand on a joué à Bordeaux (30 janvier, ndlr), j'ai été pas mal sollicité sur le sujet, j'ai expliqué mon point de vue, là je n'ai même pas envie de me pencher sur ce sujet parce que je veux me concentrer avec l'OGC Nice. Je ne parlerai pas de cette personne pour le moment. Aujourd'hui, je suis à Nice, je veux bosser pour Eric Roy et faire ce pourquoi je suis là : aider le club à sortir de cette situation délicate. Vous affrontez Reims en quarts de finale de Coupe de France, le 1er mars. La Coupe est-elle un objectif ? C'est un objectif tout naturel. On a besoin de ça pour faire vivre le club, le faire rêver. Ce n'est pas comme si on était un club en lutte pour le titre et qualifié en Coupe d'Europe. Mais d'ailleurs, pour les grandes équipes aussi, gagner des titres est toujours un objectif, même si les journaux disent parfois l'inverse. En tant que club de Ligue 1, avez-vous peur des petits ? Comment expliquez-vous cette débâcle des clubs de l'élite en Coupe de France ? La Coupe de France, c'est historiquement la coupe des petits clubs et ce n'est pas si mal. Ça rappelle que le sport, c'est pas que l'argent. Les petits quand ils jouent contre un club de Ligue 1, ils n'ont rien à perdre, ils jouent le match de leur vie, ils sont plus motivés. Inconsciemment, c'est normal et naturel que les journalistes privilégient ces petits clubs. Quand ils insistent sur leurs histoires, nous qui gagnons des tonnes d'argent, ça nous permet de garder les pieds sur terre. Je trouve que c'est du bon journalisme. Vous avez connu Laurent Blanc à Bordeaux. Quel plus peut-il apporter à l'équipe de France ? Laurent Blanc est quelqu'un qui aime manager. C'est quelqu'un d'humain, de très agréable à vivre et à qui je dois beaucoup. Par le passé, il a joué dans des grands clubs et il ne s'en est jamais vanté alors qu'il est l'un des seuls joueurs français qui serait légitime pour se la raconter. A l'inverse, il y en a d'autres, ils doivent être complexés par quelque chose dans leur vie, j'en sais rien, mais c'est incroyable combien ils se la racontent ! Quand il est venu à Bordeaux, Blanc n'avait ni besoin d'argent ni de reconnaissance. Après, il avait peut-être besoin de succès, de réussite mais c'est parce que c'est un gagneur, tout simplement. Aujourd'hui, en équipe de France, on voit qu'il y a à nouveau une bonne ambiance et c'est en partie grâce à lui. A titre personnel, vous avez remporté votre premier titre majeur avec Bordeaux, à 29 ans. Ce n'est pas un peu long d'attendre si longtemps ? Il vaut mieux un titre à la fin de sa carrière que de ne pas en avoir du tout, ce n'est pas donné à tout le monde d'être champion de France. Comment expliquez-vous la débâcle de Bordeaux en 2010 ? Dans l'équipe, à un moment donné, les joueurs ont été moins bien. Physiquement, il y a eu des soucis. Le turn-over qui a été fait l'année du titre (2009, ndlr) n'a pas été le même que celui effectué en 2010. C'était toujours la même équipe qui jouait - et ils méritaient leur place sur le terrain, là n'est pas la question - du coup, ces joueurs cadres se sont épuisés et certains joueurs comme moi, qui ne jouions plus, on était même pas fatigués, on était carbonisés. Du coup, l'entraîneur ne pouvait pas compter sur ses remplaçants. Dire que tous les joueurs ont eu un problème mental au même moment, ça je n'y crois pas.Tout est rélié au physique. Quand tu ne produis pas le même nombre d'efforts sur un terrain parce que tu es réduit physiquement, tu prends moins de risques, du coup, tu te crées moins d'occasions, tu prends un but, tu perds confiance et voilà ! C'est un cercle vicieux. Quel souvenir gardez-vous de votre expérience à Manchester United ? Grâce à Manchester, j'ai fréquenté les meilleurs joueurs au monde : Cristiano Ronaldo, Wayne Rooney, Roy Keane, Ryan Giggs, Van Nistelrooy, Veron, Barthez, Rio Ferdinand, vraiment une équipe exceptionnelle, et des hommes exceptionnels. En les côtoyant, tu grandis vite et tu apprends surtout l'humilité. J'ai côtoyé le plus haut, et c'est là où tu vois vraiment comment se joue le football. Quelle différence avez-vous ressenti avec la Ligue 1 ? En Angleterre, c'est un jeu qui est plus intéressant parce qu'il est direct. Alors qu'en France, le football est un jeu d'échec. Il n'y a pas beaucoup d'espaces, si on veut gagner il faut être intelligent. L'Angleterre, c'est pas un jeu où on met l'intelligence en avant, on met surtout le cœur en premier. La vitesse, la puissance, tout le monde attaque, tout le monde défend et on voit la différence au niveau des scores. En France, les scores sont rarement des scores de handball. (Rires). Si tout le monde aime le foot anglais, c'est qu'il y a bien une raison. Il faut le vivre, car c'est un autre monde. Quel est le joueur qui vous a le plus impressionné durant votre carrière ? Je ne sais pas si j'arriverai à être objectif. Quand j'étais gamin, je rêvais de Ryan Giggs, jour et nuit, c'était vraiment un exemple pour moi. C'est quand même un génie parce qu'il n'a pas forcément besoin de travailler comme un taré pour être aussi fort. Ryan Giggs est plus un héros d'enfance pour moi. Après mentalement Roy Keane, c'est l'exemple parfait. Au niveau du génie, je dirais Paul Scholes, mais pour moi le mec le plus complet, celui qui sait tout faire, c'est Wayne Rooney. Vous avez également joué avec Cristiano Ronaldo... Cristiano Ronaldo est un phénomène. Mais en plus de ça, c'est un mec qui s'offre une double ration de travail, ce n'est pas un bosseur, mais un fou ! Cristiano Ronaldo est un fou de travail, son Ballon est largement mérité. Tous les jours, c'était le premier à la salle d'entraînement pour travailler. Un mec comme Wayne Rooney, ce n'est pas pareil. Il peut surprendre tout le temps. Cristiano, son jeu c'est du physique et de la technique pure. A l'époque, la première année, techniquement bien sûr il était au-dessus du lot, mais physiquement, ça coinçait. Au niveau du potentiel, il avait déjà la vitesse, la puissance, pied droit, pied gauche, il n'y avait rien à dire sur ce plan-là. Après, je pense que pour lui, ça a été bien de se façonner en Angleterre, ça lui a donné le «fighting spirit». Mais de là à imaginer qu'il allait devenir Ballon d'Or, jamais je n'aurai imaginé une telle marge de progression : la puissance et la musculature qu'il a développé en quatre-cinq ans, c'est impressionnant ! ------------------------------------ Fiche technique Nom : Bellion Prénom : David Club actuel : OGC Nice Numéro : 7 Nationalité : française Date et lieu de naissance : 27 novembre 1982 à Sèvres, France Taille : 1,81m Poste : attaquant Parcours juniors 1996-2001 : AS Cannes Parcours professionnel 2001-2003 : Sunderland 24 matches (1 but) 2003-2005 : Manchester United 40 matches (8 buts) 2005-jan. 2006 → West Ham 10 matches (1 but) jan. 2006-2006 → OGC Nice 18 matches (6 buts) 2006-2007 OGC Nice 31 matches (7 buts) 2007-jan. 2011 Bordeaux 112 matches (24 buts) jan. 2011- → OGC Nice 7 matches (0 but) Sélection(s) en équipe nationale 2002-2003 France Espoirs 4 matches (0 but) Palmarès Champion de France en 2009 avec les Girondins de Bordeaux Vainqueur de la Coupe de la Ligue en 2009 avec les Girondins de Bordeaux Vainqueur du Trophée des champions en 2008 avec les Girondins de Bordeaux Finaliste de la Coupe de la Ligue en 2006 avec l'OGC Nice