«En football, personne ne peut vous garantir une place de titulaire, il faut l'arracher» «Avec Halliche et Ghilas,on ne se voit pas beaucoup mais on est souvent en contact» Islam Slimani nous a reçu chez lui à Lisbonne pour nous accorder cet interview dans laquelle il aborde plusieurs sujets touchant à sa vie quotidienne au Portugal, son ascension et sa relation avec le public du Sporting de Lisbonne. A mi-saison, Islam qui se plait bien à Lisbonne, nous dresse un premier bilan de son parcours avec son équipe et nous parle en exclusivité des contacts qu'il aurait reçus cet hiver. Tout d'abord, après presque 6 mois passés à Lisbonne, pouvez-vous revenir un peu sur cette période, vos débuts avec votre club ? Tout se passe bien pour moi. Je mène une vie paisible et tranquille. Comme vous l'avez constaté, tous les moyens sont réunis pour m'épanouir. Un grand club, des infrastructures de haut niveau et un encadrement technique et administratif à la hauteur donc, franchement, je vis dans un monde de professionnalisme ici au Portugal. Comment vous passez votre journée, dans une aussi grande ville comme Lisbonne ? Je m'entraîne le matin, je rentre chez moi, je fais ma petite sieste, je sors un peu pour prendre de l'air et le soir je suis chez moi. C'est mon train de vie, je ne suis pas fêtard, j'aime bien récupérer pour reprendre mes forces et surtout ne pas gâcher trop d'énergie. Vous veillez trop à votre hygiène de vie ? Tout à fait, ici à Lisbonne on est aux petits soins avec les joueurs, vous ne pouvez pas imaginer à quel point on s'occupe de nous. Rien n'est laissé au hasard, pour permettre au joueur de rester concentré uniquement sur le terrain. Donc, il faut répondre aux attentes du club. Et pour ce faire, il faut respecter certaines règles importantes du monde professionnel. On a remarqué cela, on a vu que même la vidange de votre voiture est assurée par le club... Voilà, c'est un exemple parmi tant d'autres. Vous savez, lorsqu'on s'occupe de vous comme ça on vous enlève toutes les excuses. A l'entrainement, il faut être ponctuel. Il ne faut pas arriver aux rassemblements en retard ou passer à côté lorsqu'on fait appel à vous. C'est pour vous dire que je suis dans un très grand club d'Europe. Vous êtes seul ici, qu'est-ce qui vous manque le plus ? La chaleur familiale, les parents, les amis et le pays. Ce n'est pas facile de vivre loin de chez soi. J'avoue que c'est difficile. C'est ce qui explique peut-être le fait que vous avez eu du mal à vous adapter... Au début oui, en plus de la difficulté de la langue où j'avais besoin de quelques mois pour apprendre le portugais, l'Algérie me manquait beaucoup. Après, je me suis adapté, je me suis dit qu'il fallait surmonter toutes les difficultés pour devenir un vrai professionnel. Pour cette première expérience professionnelle, quelles ont été les principales difficultés pour vous ? Comme je viens de le dire, la langue. Ensuite lorsque vous débarquez comme ça dans un pays, et un club où vous ne connaissez personne, ce n'est pas facile de s'intégrer, seulement, je dois dire que j'ai reçu de l'aide de la part de tout le monde. Vous cuisinez un peu chez vous ? Oui, j'essaye, j'ai appris une recette ou deux. Ça me permet de changer de nourriture. Nous, les Algériens, on est des débrouillards. On s'en sort partout (rires). Si on vous demandait de nous dresser un petit bilan de votre première moitié de saison au Sporting, que nous diriez-vous ? Je crois qu'avec un peu plus de temps de jeu, mes statistiques auraient été bien meilleures, mais bon, je ne suis pas dans un petit club. La concurrence est rude, et je crois que le fait de marquer pratiquement à chacune de mes apparitions me redonne cette confiance qu'il faut pour continuer à me battre. Avec vos camarades en sélection, Halliche, et Ghilas ça se passe comment ici au Portugal ? Très bien, on ne se voit pas souvent parce qu'on est un peu loin l'un de l'autre, mais on reste en contact. On s'appelle au téléphone et chacun de nous vient aux nouvelles de l'autre. Vous évoquez certainement le sujet de la sélection ? Oui, bien sûr, on évoque cela ensemble mais comme je vous l'ai dit, ce n'est pas facile de trop se voir. Ça parle forcément du Mondial ? C'est vrai, même si on est encore un peu loin de la Coupe du monde, on parle beaucoup entre nous du Mondial. On évoque le groupe sur lequel on est tombé. C'est un rendez-vous très important dans la carrière d'un footballeur. Halilhodzic a été très clair, celui qui n'aura pas assez de temps de jeu, ne fera pas avec lui le Mondial, cela vous met sous pression ou vous pousse à travailler ? Moi personnellement, je prends la chose du bon côté. C'est le coach, il faut respecter ses critères de choix. Mais cela vous concerne, vous ne jouez pas trop avec le Sporting... Oui, je sais mais je ne suis pas inquiet, croyez-moi. Je vais finir par m'imposer. Je suis conscient de mes capacités. Je crois en mes qualités, je n'ai pas choisi la facilité, j'assume et je promets que je vais tout faire par jouer. Ne songez-vous pas à changer de club, cet hiver ? Je dirais que je suis heureux ici, et je vais tout donner pour jouer plus souvent. Le coach Jardim me dit à chaque fois qu'il compte sur moi, donc, à moi de me montrer patient et saisir ma chance. Mais on vous annonce à Sassuolo, l'Olympiakos et d'autres clubs anglais qui seraient sur vos traces, une confirmation ? Je ne peux confirmer cela, mais soyez sûr, mon agent est au courant de tout. Moi je travaille et je reste concentré sur mon club, le Sporting Lisbonne. Avez-vous reçu des garanties ? En football, aucun entraîneur ne peut vous garantir une place de titulaire, il faut l'arracher. Et c'est pour cela que je travaille tous les jours pour y arriver. La concurrence existe partout, au Sporting elle est un peu plus grande, mais je reste optimiste. Ça sera aussi le cas en sélection, il y a des attaquants de valeur qui seront en concurrence avec vous, à l'image de Belfodil, Djebbour, Ghilas et Soudani, des appréhensions à 6 mois du Mondial ? Franchement, non ! Je suis même serein. Chacun connaît sa valeur, on doit rester compétitifs et positifs. Après, quel que soit le joueur qui défendra les couleurs de l'Algérie, je serai derrière lui. En sélection, on est un groupe soudé et on se bat tous pour un unique objectif. On parle beaucoup de la prolongation du contrat de Halilhodzic cela ne risque-t-il pas de perturber les joueurs ? Vous savez, chacun de nous travaille pour être au top en sélection, pour le reste, ce n'est pas dans nos prérogatives de faire des commentaires sur des choses qu'on ne maîtrise même pas. Le Sporting compte combien de Mondialistes ? On est 4 à postuler à jouer le prochain Mondial. Deux Portugais, Rui Patricio, William Carvalho, le défenseur argentin Marco Rojo et moi-même. Vous parlez bien sûr de cette échéance importante... Pas trop, notre conversation tourne surtout autour du Sporting Lisbonne. Par contre, mes camarades brésiliens sont tous contents de voir l'Algérie jouer ce Mondial au Brésil. On parle beaucoup des villes qui vont abriter nos matchs, et ils m'ont promis de venir nous voir au Brésil. Après le Ballon d'Or, vous êtes aussi nominé pour le meilleur sportif de l'année, un commentaire ? Je pense que le fait d'avoir été de nouveau retenu parmi les meilleurs sportifs de l'année en Algérie, est déjà une grande satisfaction. C'est une reconnaissance qui m'honore. Ce qui donne plus de mérite à votre Ballon d'Or, non ? C'est vrai, je suis vraiment flatté. Je serais très heureux de pouvoir postuler à ce titre de meilleur sportif en Algérie. C'est une autre distinction qui me fera énormément plaisir. Sinon, je féliciterai le lauréat, car je trouve qu'il l'aura méritée quel que soit son nom. Halilhodzic avait aussi déclaré qu'il était fier de vous avoir fait confiance parce qu'il a fait de vous un Ballon d'Or, qu'avez-vous à dire ? Ça fait plaisir. Je ne le dirai jamais assez, sans Halilhodzic, je n'aurai pas joué pour un grand club comme le Sporting. Il a donc contribué à ma distinction. Parlons un peu de votre club, le Sporting leader du championnat, comment qualifiez-vous ce résultat ? C'est un bon bilan, on termine à la première place mais bon, il reste toute une phase retour à disputer. On va continuer à travailler et garder les pieds sur terre pour ne pas se tromper d'objectifs. On a un bon groupe, qui avance bien, c'est le plus important. Vous êtes éliminés de la Coupe du Portugal, cela reste quand même l'unique objectif pour le Sporting, gagner le championnat... Ecoutez, nous, on prend les choses comme elles viennent, on va jouer match par match. On ne peut s'avancer maintenant et dire qu'on est bien partis ou pas. Le football se joue sur le terrain. A nous de rester lucides et redoubler d'efforts. Vous avez sorti un match parfait contre Porto, ici on parle beaucoup de votre prestation... C'est franchement réconfortant de jouer d'entrée. Cela veut dire que le Sporting et mon entraîneur Jardim comptent sur moi. Je me suis donné à fond et, Hamdoulillah, tout le monde était content de mon rendement. Vous êtes adulé par les fans du Sporting, on les a vus vous solliciter pour des photos, que ressentez-vous ? C'est une fierté, mais je n'ai pas encore prouvé pour mériter tout cet égard des supporters. Après, je me suis rendu compte qu'ici au Sporting les couleurs ont de la valeur et le joueur du club est très respecté, ça fait chaud au cœur. On les a vus surtout vous demander de renouveler les exploits réalisés cette année, 4 buts en 246 minutes jouées uniquement... Oui, peut-être, c'est en tout cas très rassurant. Le soutien du public me donne énormément de confiance pour la suite. Vous pensez déjà à la Belgique, qui sera votre premier match ? Le mieux, c'est de bien gérer cette période d'avant-Mondial. Après, on ne pensera pas uniquement à la Belgique, mais aussi à la Russie et la Corée, donc ça fera trois gros morceaux à affronter en Coupe du monde. Un vœu pour terminer cet entretien ? Je remercie tous les gens qui ont voté pour moi, j'étais vraiment très honoré de constater que pas moins de 500 000 fans ont voté pour moi sur les deux sites d'El Heddaf et Le Buteur. Ça fait plaisir et je tiens à leur dire que je ferai tout pour ne pas les décevoir.