On déclare vouloir aller vers l'économie de marché, on déclare vouloir maintenir l'option de l'économie de marché, mais, au fond, dans la discrétion on se pose la question de savoir si réellement il serait possible de disposer d'assez de temps et surtout de réussir à faire atteindre à nos entreprises l'objectif d'acquisition du top niveau, en comparaison avec les firmes internationales qui raflent tous les marchés. Serait-il possible, également, à l'instar du domaine du médicament, de prendre les mêmes mesures d'interdiction des importations des produits qui sont fabriqués sur le territoire national, ce qui est une des revendications du patronat algérien ? Mais, si on étend cette mesure à tout ce qui est fabriqué localement, la qualité de ces produits nationaux, satisferait-elle les consommateurs locaux ? Quel bilan se doit de présenter régulièrement le gouvernement ? Celui du niveau des dépenses publiques ? Celui de leur traduction en réalisations physiques ? Celui de l'assainissement des entreprises publiques? Celui des performances sociales ? Celui de l'apport des IDE par la création d'un climat favorable aux affaires ? Sur quelles bases notre économie peut-elle démarrer, c'est-à-dire connaître enfin sa relance ? Ce sont des questions devenues habituelles et les réponses sont également devenues habituelles. On dit que trois axes de travail au moins peuvent être distingués, à savoir un assainissement profond du secteur financier, une amélioration plus qu'effective de la situation des entreprises, enfin un effort soutenu de recherche et développement. Sur ces trois axes, tout est à faire, pratiquement à redémarrer. Faudrait-il considérer que seule une privatisation, même partielle, contribue à cet assainissement, ou plutôt résume celui-ci ? Pour ceux qui voudraient que soit opté pour une privatisation totale, et encore en faveur des banques étrangères, et surtout dans ce dernier cas, deux questions au moins peuvent se poser. La première concerne la possibilité que ces banques qui passent de main se fassent l'obligation de financer les investissements. La deuxième concerne le maintien en activité de ces banques privatisées dans un contexte durable de restriction des ressources provenant de la vente des hydrocarbures car, bien entendu, les banques privatisées doivent transformer leurs dividendes en devises exportables. Sur le deuxième axe, soit une amélioration de la situation des entreprises, la question se pose sur l'évaluation de la capacité des entreprises à devenir performantes et compétitives. Il s'agit bien évidemment des entreprises nationales, que celles-ci relèvent du secteur public ou du secteur privé. Sur le troisième axe, il y a problème. La recherche et développement n'a pas intégré encore les préoccupations de nos entreprises, ce qui implique qu'il ne pourrait pas y avoir d'innovation. Sans innovation, comment rendre nos produits compétitifs ? Les discours ont changé dans un contexte où dit-on, les comportements sont restés figés. La mondialisation vient compliquer davantage les données compte tenu que bien des pays en développement savent qu'ils risquent de perdre même ce qui leur reste d'une industrie qui avait fait leur fierté durant les années de gloire du socialisme. Y a-t-il une alternative ? On dit que les richesses ne se partagent pas avec équité, alors même que pour les pays en développement, comme dans notre cas plus particulièrement, ce n'est pas la croissance qui est redistribuée, ni la richesse crée, mais la rente pétrolière. Pourquoi ne parle-t-on plus de budget de rigueur, de diminution du train de vie de l'Etat, et pourquoi on n'utilise même plus le terme de rationalisation des dépenses publiques ? Même le concept de bonne gouvernance est apparemment utilisé dans les discours, sans que réellement il donne lieu à des prises de décision explicitées et à un contrôle public transparent. On ne parle plus de bénéfices à partager, ni des dividendes de la croissance, ni même de partage de prospérité à l'intérieur du pays, si prospérité existe. Pour ce qui concerne les relations internationales, on ne parle plus de prospérité partagée, surtout qu'avec l'inégalité de développement et plus particulièrement le nationalisme économique, la prospérité n'a pas de caractère transfrontalier, prise en otage à l'intérieur des frontières des pays développés. On ne parle plus de partage des bénéfices des entreprises publiques comme cela se faisait couramment durant la décennie 70, car les entreprises d'une part, sont endettées en attendant le nième assainissement des finances, d'autre part, ne connaissent pas très bien ce qu'elles vont devenir, le modèle économique à suivre étant encore incertain, ce qui les empêche de faire des projections.