Les cours du pétrole ont poursuivi leur mouvement baissier, avant-hier, à New York, finissant à un niveau plus atteint depuis le 20 octobre. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en juillet a perdu 1,29 dollar par rapport à la clôture de la veille, à 86,53 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). Cette baisse fait suite à une nouvelle hausse spectaculaire des inventaires de brut aux Etats-Unis, premier consommateur d'or noir de la planète. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet a fini à 101,87 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE), en baisse de 1,60 dollar par rapport à la clôture de la veille. Le département américain de l'Energie (DoE) a fait état d'une hausse des réserves de brut lors de la semaine achevée le 25 mai de 2,2 millions de barils, vingt fois plus importante qu'attendu par les analystes. Ces stocks sont à leur plus haut niveau depuis fin juillet 1990, juste avant l'invasion du Koweït par l'Irak qui allait déclencher la Guerre du Golfe et provoquer une chute de la production puis des stocks. Un signe peu encourageant sur la demande énergétique du pays. Les stocks de produits distillés (dont le gazole et le fioul de chauffage) ont quant à eux reculé de 1,7 million de barils, et les stocks d'essence de 800 000 barils, des replis plus prononcés qu'attendu. Mais pour Phil Flynn, analyste chez Price Futures Group, le contenu du rapport n'est pas surprenant étant donné que la demande est faible depuis plusieurs semaines. Je ne sais pas s'il était si baissier que ça ou si c'est plus que le marché s'inquiète pour l'économie mondiale, a-t-il avancé. Le marché a été déçu par les statistiques économiques publiées aux Etats-Unis, a-t-il estimé. La croissance économique des Etats-Unis a ralenti plus qu'on le pensait jusque-là au premier trimestre, selon la deuxième estimation du PIB américain d'hiver publiée jeudi à Washington. Par rapport au trimestre précédent, le produit intérieur brut du pays a augmenté de 1,9% en rythme annualisé de janvier à mars après avoir progressé de 3,0% pendant les trois mois d'automne, a indiqué le département du Commerce.Les données économiques semblent déterminées à contrecarrer toute tentative de relance à la hausse des cours, a déploré Matt Smith, de Summit Energy. Ces chiffres interviennent à la veille du rapport mensuel sur l'emploi américain, considéré comme un baromètre de la situation économique du pays. De manière générale, le marché pétrolier est secoué par les même vieilles peurs macroéconomiques qui tirent tous les marchés de concert vers le bas, pâtissant à l'instar des Bourses de l'aversion des opérateurs pour les actifs jugés risqués, a souligné Andrey Kryuchenkov, analyste de VTB Capital. En ce moment, le marché semble tabler sur un avenir sombre, fait de fortes perturbations pour l'économie mondiale des deux côtés de l'Atlantique, a poursuivi Amrita Sen, analyste de Barclays Capital. Ainsi, dans la zone euro, le risque de voir des partis anti-austérité gagner (les élections législatives du 17 juin) en Grèce, et la lenteur des responsables de la zone euro à répondre aux problèmes (de la région) maintiennent le marché sous pression, a-t-elle noté. Les banques espagnoles, minées par des crédits immobiliers à risques, concentrent notamment l'attention des opérateurs, qui se demandent si l'Espagne a les moyens de recapitaliser ses établissements bancaires et notamment Bankia, premier prêteur du pays. Les cours du pétrole poursuivaient leur repli en Asie, toujours déprimés par la situation financière de l'Espagne, qui pourrait peser sur la demande d'or noir si la crise s'étend à d'autres grands pays de la zone euro. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en juillet perdait 24 cents, à 87,58 dollars, dans les échanges matinaux. Le baril de Brent de la mer du Nord à même échéance reculait de 34 cents à 103,13 dollars. "Pour le moment, le marché est totalement ouvert. Il y a encore de la place pour une poursuite de la baisse si le pessimisme persiste sur l'avenir de la zone euro", a déclaré Nick Trevethan, analyste chez ANZ Research. La veille, l'Espagne avait tenté, en vain, d'enrayer l'envolée de ses taux d'emprunt sur les marchés en précisant les modalités de son plan de sauvetage de la grande banque en difficulté Bankia. Le pays a également reçu l'appui bienvenu de la Commission européenne, qui est prête à lui donner du temps pour réduire son déficit. Mais sa prime de risque (surcoût payé par l'Espagne pour emprunter à dix ans par rapport à l'Allemagne, référence en zone euro) a battu de nouveaux records, jusqu'à 541 points. "Rien n'est plus important maintenant que de retrouver la confiance" du marché: "sans elle, nous ne pourrons résoudre aucun de nos problèmes", a déclaré le gouverneur de la Banque d'Espagne, Miguel Angel Fernandez Ordonez, devant le Sénat.