La compagnie pétrolière Shell a finalement reçu les autorisations qu'elle espérait pour démarrer une campagne de forages controversée au large de la Guyane. Deux arrêtés ont été signés au cours de la semaine écoulée, a annoncé la préfecture de Guyane. Ils autorisent Shell à lancer une campagne de forages exploratoires au large de la Guyane, et à mener d'ici la fin de l'année des études sismiques qui permettront d'évaluer le potentiel guyanais en hydrocarbures, après la découverte l'an dernier d'or noir par 6 000 mètres de profondeur. Une porte-parole de Shell France a indiqué qu'avec l'obtention de ces feux verts, la campagne de forages allait pouvoir démarrer très rapidement, sans doute dans le courant de la semaine prochaine. C'est un soulagement, a déclaré le président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip), Jean-Louis Schilansky, qui y voit un signe positif pour la Guyane et la France, vu les importantes retombées économiques potentielles du pétrole guyanais, et pour les investisseurs internationaux. La compagnie anglo-néerlandaise (associée en Guyane au français Total et à la britannique Tullow Oil) est ainsi sortie victorieuse du bras de fer déclenché par Nicole Bricq. Il y a dix jours, la ministre avait annoncé (conjointement avec son homologue chargé du Redressement productif Arnaud Montebourg) une remise à plat de tous les permis d'exploration pétroliers et gaziers, en attendant une refonte du code minier, accusé de sacrifier l'environnement sur l'autel du libéralisme. Conséquence immédiate: les forages programmés cet été par Shell en Guyane, préparés depuis des mois, et qui n'attendaient plus que les fameux arrêtés préfectoraux pour pouvoir démarrer, se retrouvaient du même coup suspendus. Mais cette décision, annoncée à la stupéfaction de l'industrie pétrolière, a été rapidement contredite, après notamment la montée au créneau d'élus guyanais, très attachés aux retombées socio-économiques des forages. Dès le lendemain, un second communiqué commun précisait qu'il n'était pas envisagé de remettre en cause les permis déjà octroyés pour la recherche de pétrole et de gaz conventionnel, ce qui avait été accueilli par Shell comme un premier signe positif. Et cette semaine, après une réunion avec le ministre de l'Outremer Victorin Lurel, des parlementaires guyanais ont annoncé que les arrêtés seraient rapidement signés et que les forages pourraient donc démarrer à la fin du mois. Après cet imbroglio gouvernemental, Mme Bricq a été débarquée à la surprise générale du ministère de l'Ecologie à la faveur du remaniement post-législatif intervenu, et recasée à la tête du Commerce extérieur. Elle a été remplacée par Delphine Batho, exfiltrée d'un ministère de la Justice où elle ne s'entendait pas avec sa ministre de tutelle... la guyanaise Christiane Taubira. Un transfert très mal vécu par les associations de défense de l'environnement, déjà sonnées par le revirement autour de la remise à plat du permis de Shell. Il est difficile de ne pas voir l'éviction de Nicole Bricq comme la conséquence possible d'un lobbying efficace mené par l'industrie pétrolière. Il est vrai qu'en période de crise, le chantage à l'emploi est d'une redoutable efficacité, s'est alarmée vendredi l'association France nature environnement dans un communiqué. Des soupçons d'intervention rejetés catégoriquement par le président de l'Ufip. On est dans le fantasme, c'est totalement inapproprié, a-t-il réagi.