Le géant américain de l'internet Google a indiqué avoir commencé à appliquer le droit à l'oubli prescrit par la Cour européenne de Justice. Cette semaine, nous avons commencé à prendre des mesures concernant les demandes de suppression (de liens) que nous avons reçues, a affirmé Google dans un courriel. Chaque demande doit être traitée individuellement et nous travaillons aussi vite que possible pour réduire la file d'attente, a ajouté le groupe américain basé en Californie. La Cour européenne de justice avait décidé en mai que les moteurs devaient supprimer la référence aux pages périmées ou non-pertinentes concernant une personne, après la plainte d'un internaute espagnol qui voyait apparaître des liens vers un article de 1998 sur une saisie immobilière le concernant. De fait, des liens dont les internautes avaient demandé la suppression ont disparu des résultats de recherches, a indiqué l'agence Reputation VIP, qui évalue la notoriété sur internet. Grâce à nos algorithmes, nous avons constaté que des pages avaient été déréférencées, a expliqué jeudi le patron de l'agence Bertrand Girin, capture d'écran à l'appui. Lorsque l'on fait une recherche avec le nom d'une personne, Google ne montre plus certains résultats et appose la mention: Certains résultats peuvent avoir été supprimés conformément à la loi européenne sur la protection des données. Autre nouveauté, Google fait figurer cette mention sur de nombreuses recherches par nom propre en Europe, y compris sur le nom de personnes qui n'ont pas demandé un retrait de résultats --ce qui évite de signaler aux internautes ceux qui auraient fait une telle démarche. Début juin, Google a mis en ligne un formulaire permettant aux internautes de demander le déréférencement de pages les concernant. Quatre jours après, le site avait déjà reçu 41 000 demandes. Google précise qu'il n'accepte de supprimer la référence que si les résultats sont inadéquats, pas ou plus pertinents ou excessifs et que chaque demande individuelle est examinée pour trouver un juste équilibre entre les droits d'un individu à contrôler ses données personnelles et le droit du public à accéder à ces informations et à les diffuser. Mais Google rappelle qu'il peut supprimer la référence, et non la page elle-même, et qu'il ne supprime la référence que pour les recherches comportant le nom de la personne. De plus, Google n'éradique ces résultats que pour des recherches effectuées sur ses pages européennes. Ainsi une recherche sur Google Canada pourra faire apparaître les références enlevées sur Google France. La création de ce droit à l'oubli numérique répond à un souci croissant des internautes de contrôler leur réputation sur internet et de protéger leurs informations personnelles. John Simpson, de l'association américaine de défense des consommateurs Consumer Watchdog, demande le même droit à l'oubli aux Etats-Unis. En dépit de ce que les gens affirment, le droit à l'oubli n'est pas la censure. Il apporte à l'âge numérique le réel avantage de l'anonymat de la vie privée, a-t-il fait valoir. De nombreuses entreprises proposent d'éliminer ou de rendre moins visibles les informations négatives à leur sujet. ReputationVIP met par exemple à disposition un service en ligne baptisé Forgetme, qui propose un formulaire avec des termes juridiques adaptés pour réclamer leur élimination des recherches sur Google. Le géant de l'internet a mis en place une sorte de comité des Sages pour l'aider à distinguer entre ce qui relève de la liberté d'information et ce qui est considéré comme droit à l'oubli. Ce petit groupe comprend le directeur général de Google Eric Schmidt, le fondateur de Wikipedia Jimmy Wales, deux universitaires spécialistes d'internet et de droit, l'ancien directeur de l'agence espagnole de protection des données privées, Jose Luis Pinar, et l'envoyé spécial des Nations unies (ONU) pour la liberté d'expression, Frank La Rue.