L'Arabie saoudite a sommé la milice chiite des Houthis, qui s'est emparée du pouvoir dans la capitale yéménite Sanaa, de mettre fin à son coup d'Etat pour rétablir les autorités légitimes représentées par le président Abd Rabbo Mansour Hadi. Une sortie de crise passe par le rejet du coup d'Etat du 6 février et le retrait des Houthis armés de tous les bâtiments publics et le rétablissement du gouvernement légitime, a déclaré le ministre des Affaires étrangères Saoud Al-Fayçal dans une conférence de presse à Riyad avec son homologue britannique Philip Hammond. Il a souligné, dans ce contexte, la nécessité de hâter la tenue à Riyad d'une conférence de réconciliation inter-yéménite, convoquée par le roi saoudien à la demande du président Hadi. Sont invitées à participer à cette conférence toutes les factions yéménites qui désirent préserver la sécurité et la stabilité du Yémen, a ajouté le prince Saoud, sans avancer de date pour cette rencontre à propos de laquelle les Houthis ne se sont pas clairement prononcés. Le chef de la milice chiite des Houthis, Abdel Malek al-Houthi, a implicitement rejeté l'offre de Riyad dans un discours dimanche soir. Le dialogue ne peut être placé sous le patronage d'une quelconque partie qui alimente les tensions au sein du peuple yéménite, a-t-il dit dans une allusion à l'Arabie saoudite sunnite, qui classe les Houthis comme organisation terroriste. Les belligérants au Yémen, où le conflit s'est durci, ont continué lundi à mobiliser leurs troupes en dépit d'un appel du Conseil de sécurité de l'ONU à reconnaître la légitimité de M. Hadi et à préserver l'unité du pays. Evoquant par ailleurs la perspective d'une solution politique en Syrie après plus de quatre ans de guerre dans ce pays, le prince Saoud a répété que le président Bachar al-Assad n'avait aucun rôle à jouer actuellement ou à l'avenir dans un règlement négocié. En attendant un tel règlement, il importe de soutenir militairement l'opposition modérée pour réaliser sur le terrain un équilibre des forces avec les troupes du régime Assad, selon lui.
Le Conseil de sécurité soutient le président Hadi et l'unité du pays Le Conseil de sécurité de l'ONU a publié dimanche une déclaration unanime de soutien au président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, en lutte contre les miliciens chiites Houthis, lors d'une réunion d'urgence à New York. Dans leur déclaration, les 15 pays membres agitent une vague menace de sanctions contre les Houthis, comme ils l'ont déjà fait en vain, à de nombreuses reprises depuis le début de la crise yéménite. Ils y réaffirment leur engagement ferme en faveur de l'unité et de la souveraineté du pays. Selon l'émissaire de l'ONU au Yémen Jamal Benomar qui s'est adressé au Conseil par vidéoconférence depuis le Qatar, le pays s'achemine vers une guerre civile et risque la dislocation, avec une division croissante entre le nord et le sud. Il est illusoire, a-t-il affirmé, de penser que les Houthis puissent s'emparer de l'ensemble du pays ni que le président Hadi puisse reprendre par la force le contrôle de la situation. Continuer les hostilités mènera à un scénario libyen ou syrien et la seule solution est politique, a-t-il ajouté. Mais lors de consultations à huis clos, M. Benomar n'a pas suggéré des mesures -- sanctions ou autres -- susceptibles d'amener les belligérants à négocier, selon des diplomates. Dans sa déclaration, le Conseil soutient la légitimité du président Abd Rabbo Mansour Hadi et appelle tous les acteurs de cette crise à s'abstenir de toute action qui nuirait à cette légitimité et à l'unité du Yémen. Il appuie les efforts de médiation du Conseil de coopération du Golfe, et notamment sa proposition de tenir une conférence à Riyad, ainsi que ceux, jusqu'ici infructueux mais qui doivent accélérer, de M. Benomar. Il appelle également tous les Etats membres à s'abstenir de toute ingérence qui attiserait le conflit et aggraverait l'instabilité, une référence apparente mais implicite à l'Iran qui soutient les Houthis. Le président Hadi est pour sa part appuyé par les monarchies sunnites du Golfe, dont l'Arabie saoudite. Il condamne les actions unilatérales menées par les Houtis et les menace, s'ils ne relâchent pas l'emprise qu'ils ont désormais sur une bonne partie du pays, de prendre de nouvelles mesures, un euphémisme pour désigner des sanctions, sans plus de précisions. En novembre dernier, le Conseil avait sanctionné, par un gel d'avoirs et une interdiction de voyager, l'ex-président Ali Abdallah Saleh, allié des Houthis, et deux responsables de la milice chiite, sans aucun effet. Condamnant une nouvelle fois les récents attentats contre des mosquées, revendiqués par le groupe Etat islamique, ainsi que les raids aériens menés contre le palais présidentiel et l'aéroport d'Aden, les membres du Conseil se disent inquiets de la capacité d'al-Qaïda dans la péninsule arabique de profiter de la détérioration de la situation. Le conflit s'est étendu dimanche au Yémen avec la prise par des miliciens chiites de l'aéroport de Taëz, ville qui ouvre la voie vers Aden (sud) où est retranché le président Hadi. Des combats avaient opposé jeudi à Aden partisans et adversaires de M. Hadi au sein des forces de sécurité tandis qu'une série d'attentats-suicide anti-Houthis vendredi à Sanaa et revendiqués par l'EI faisaient 142 morts, forçant les Etats-Unis à évacuer leur personnel encore dans le pays, dont des militaires. Cette réunion d'urgence du Conseil avait été demandée par le président Hadi. Il réclamait du Conseil une intervention urgente, la prise de sanctions et une résolution contraignante, et non une simple déclaration. Dans une déclaration diffusée à l'issue de la réunion, l'ambassadrice américaine Samantha Power a averti que la population yéménite allait subir les conséquences d'une poursuite des hostilités: près de 16 millions de personnes, soit 61% de la population du Yémen, ont déjà grand besoin d'une aide humanitaire.