Les cours du soja et du maïs ont profité cette semaine d'une canicule dans le Midwest et des dommages subis en Amérique du Sud, mais ceux du blé ont souffert de l'annonce d'une excellente moisson. "La moisson de blé d'hiver est la meilleure qu'on ait jamais vue, surtout au cœur de la région de culture au Kansas, ce qui a permis de moissonner beaucoup plus qu'on ne le pensait alors même qu'on en a moins planté" que l'année précédente, a expliqué Bill Nelson, chez Doane Advisory Services. Du coup, les cours de la céréale, qui avaient grimpé avec le thermomètre en début de semaine, ont perdu tous leurs gains vendredi, car le ministère de l'Agriculture (USDA) a révisé en nette hausse ses prévisions de stocks de blé dans son analyse mensuelle de l'offre et de la demande, parue vendredi. En revanche le maïs et le soja, qui avaient cédé un peu de terrain jeudi avec l'espoir de pluies bénéfiques la semaine prochaine, sont repartis en hausse vendredi. En effet, l'USDA a revu en forte baisse ses estimations de stocks américains, allant bien au-delà des attentes des analystes qui avaient anticipé le mouvement. Bill Nelson a expliqué que la météo actuelle aux Etats-Unis et celle des derniers mois en Amérique du Sud avaient toutes les chances de réduire l'offre et de gonfler la demande de production américaine. Au Brésil, où les régions agricoles ont souffert d'une sévère sécheresse, le gouvernement a revu à la baisse cette semaine ses prévisions de récolte. Ces soucis avec la production sud-américaine sont une bonne nouvelle pour les vendeurs de soja et de maïs américains et se traduisent par un bon niveau des ventes à l'exportation. En outre aux Etats-Unis, "il fait en ce moment 35 ou 36 degrés Celsius dans le Midwest", ce qui pourrait abîmer les champs qui viennent d'être semés en maïs et où le soja commence à être planté, a expliqué M. Nelson. "Des pluies devraient venir de l'ouest en commençant par le Colorado à partir de lundi ou mardi, mais si elles n'apportent pas le soulagement espéré on pourrait se lancer dans une nouvelle escalade" des cours, a-t-il dit.
Questions sur La Nina Mais certains analystes craignaient des mouvements exagérés. "L'emballement médiatique qui annonce que [le phénomène climatique] La Nina [qui pourrait provoquer une sécheresse] va réduire les moissons de l'automne tourne à l'hystérie", notait Dewey Strickler, chez Ag Watch Market Advisors, mais "on va être extrêmement déçu si cela ne se confirme pas", a-t-il dit. D'autant que "pendant ce temps, les pousses de maïs sont en meilleur état qu'il y a un an" à la même époque, selon l'évaluation publiée en début de semaine par l'USDA. M. Strickler était aussi inquiet d'un possible retournement du marché du soja, dont les semis avancent plus rapidement que d'habitude, tandis que les premières pousses évaluées sont également de meilleure qualité qu'à l'usuel. "Le principal dilemme des investisseurs pariant à la hausse est lié à la possibilité que La Nina ne provoque pas les mauvaises conditions attendues", a expliqué M. Strickler dans une note. Les analystes de la maison de courtage Allendale ont cité des prévisions des services météo nationaux montrant que La Nina avait beaucoup plus de chances de se développer à l'automne, voire en hiver, qu'en début d'été. Cela pourrait selon eux plus toucher les rendements de soja que ceux de maïs. Ils ont toutefois noté que les rendements de maïs allaient probablement être moins bons que d'habitude vu la météo. "La grande question c'est de savoir à quel point", ajoutaient-ils. "C'est un marché qui repose sur la météo de l'été", ont-ils conclu. Le boisseau de maïs (environ 25 kg) pour livraison en juillet, le contrat le plus actif, a fini la séance vendredi à 4,2300 dollars contre 4,1825 dollars en fin de semaine précédente, une progression de 1,14%. Le boisseau de blé pour juillet, lui aussi le plus actif, valait 4,9500 dollars, contre 4,9725 dollars auparavant, en repli de 0,45%. Le boisseau de soja pour juillet, là encore le plus échangé, coûtait 11,7825 dollars contre 11,3200 dollars précédemment, en hausse de 4,09%.
Réduction des stocks mondiaux de soja et de maïs Le ministère américain de l'Agriculture (USDA) a revu vendredi à la baisse ses prévisions de stocks mondiaux de soja et de maïs pour 2016/2017, laissant présager une hausse du prix de ces produits utilisés pour nourrir le bétail. Le stock mondial de soja pour la prochaine campagne est revu à la baisse de 2 millions de tonnes (Mt), à 66 Mt, en raison de stocks plus bas que prévu aux Etats-Unis et d'une production moindre au Brésil, les deux principaux producteurs de l'oléagineux, indique l'USDA dans son rapport mensuel sur l'offre et la demande de produits agricoles dans le monde. "Ce repli des stocks est encore plus bas que ce que le marché imaginait", ce qui devrait continuer de pousser les prix à la hausse, pénalisant les éleveurs européens qui importent beaucoup de soja, explique Gauthier Le Molgat, analyste chez Agritel. L'USDA anticipe d'ailleurs une hausse des exportations américaines, car "la demande mondiale reste très soutenue, surtout de la part des Chinois" pour leurs élevages porcins, souligne-t-il. En maïs, les stocks sont également revus à la baisse de 3 Mt aux Etats-Unis, de très loin le premier producteur et exportateur mondial, qui devraient également accroître leurs exportations. Toutefois, les semis venant juste de se terminer, il faudra attendre fin juin pour avoir l'estimation des surfaces plantées et voir comment se passe "l'étape déterminante de la floraison mi-juillet", qui donnera une idée plus précise de la future production américaine, récoltée à l'automne, rappelle M. Le Molgat. En blé, l'USDA revoit à la hausse sa prévision de production mondiale, à 730 Mt contre 727 estimées le mois dernier. L'organisme s'attend à de meilleures récoltes que prévu aux Etats-Unis, en Russie et dans l'Union européenne. En France, premier producteur et exportateur européen, les fortes pluies du mois de mai devraient rester sans effet sur la récolte, car la baisse de rendements dans les régions inondées devrait être compensée par une hausse de production dans d'autres régions où les pluies auront eu un effet bénéfique sur le blé, estiment les auteurs du rapport.