Le Canada renonce à acheter des avions de combat Super Hornet, a annoncé vendredi le constructeur américain Boeing, au profit de vieux chasseurs F18 australiens, une décision sonnant comme une mise à exécution des menaces brandies par le Premier ministre Justin Trudeau. "Si Boeing continue d'insister à vouloir éliminer des dizaines de milliers d'emplois au Canada en s'attaquant à Bombardier, il ne devrait pas s'attendre de notre part, comme gouvernement, à ce que nous lui achetions des avions", avait prévenu en septembre le Premier ministre canadien Justin Trudeau. Boeing avait hérissé le gouvernement canadien en obtenant de l'administration du président Donald Trump l'imposition de taxes pour tout avion civil CSeries du constructeur Bombardier vendu aux Etats-Unis. Se réfugiant derrière des "informations de presse", Boeing a indiqué dans un communiqué respecter "la décision du gouvernement canadien" d'avoir choisi le F18 australien au lieu des chasseurs Super Hornet, et s'est félicité que l'armée canadienne fasse le choix d'un chasseur bimoteur, répondant aux impératifs de la coopération du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du nord (NORAD). Le F18 avait été élaboré et construit dès 1980 par l'Américain McDonnell Douglas, racheté par Boeing en 1997. Il y a un an, le Canada avait annoncé une commande de 18 chasseurs Super Hornet à Boeing, évaluée à 5 milliards de dollars, pour remplacer une partie de ses 77 appareils F18 vieillissants et en attendant de lancer en 2019 un appel d'offres afin de moderniser sa flotte de combat. "Notre gouvernement s'est engagé à fournir à l'aviation royale canadienne l'équipement essentiel dont elle a besoin jusqu'à ce qu'une flotte de chasseurs de remplacement permanente soit pleinement opérationnelle", a souligné vendredi Byrne Furlong, porte-parole du ministère de la Défense. Le choix des F18 australiens pourrait être officialisé dans les prochains jours et marquerait alors la réponse canadienne à la multiplication des conflits commerciaux entre les deux voisins nord-américains. Au printemps, Boeing a accusé le canadien Bombardier de fabriquer ses avions de 100 à 160 places grâce à des subventions publiques et de les avoir vendus à perte à la compagnie américaine Delta Air Lines. Ces appareils entrent en concurrence directe avec le Boeing 737 ou les avions de la famille A320 d'Airbus. L'administration du président Donald Trump avait alors décidé cet été d'imposer des droits compensatoires de 220% et une taxe antidumping de 80% sur ces avions Bombardier importés aux Etats-Unis. Outre la renégociation de l'Accord de libre-échange nord-américain (Aléna) imposée par Donald Trump au Mexique et au Canada, d'autres dossiers comme le bois de construction ou le lait empoisonnent les relations canado-américaines. Après son attaque contre son concurrent canadien, Boeing avait lancé une offensive de charme auprès de l'opinion publique canadienne en vantant ses 2.000 emplois. Loin des 23.000 salariés de Bombardier et de ses sous-traitants aux Etats-Unis, avait rétorqué la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland en accusant Boeing de vouloir "détruire" le secteur aérospatial canadien. En octobre, le gouvernement canadien avait suspendu les discussions avec Boeing et avait déposé une offre pour l'achat des F18 australiens entrés en service dans les années 80, comme ceux de l'armée de l'air canadienne. "Nous explorons activement (différentes) options, y compris avec l'Australie, à la lumière de leur récente notification de céder leurs F18, des pièces détachées et de l'équipement", a indiqué la porte-parole du ministère de la Défense sans ajouter de commentaire à l'annonce de Boeing.