Les Etats-Unis ont relancé lundi un vieux conflit commercial avec le Canada en imposant des taxes sur les importations de bois de construction, au risque de tendre davantage les relations entre les deux pays. Le département du Commerce (DoC) a indiqué que ces droits compensateurs (countervailing duties) seraient immédiatement perçus et s'échelonneraient entre 3,02% et 24,12% selon les entreprises canadiennes. Ces mesures, qualifiées de "préliminaires" par la partie américaine ont immédiatement suscité une vive réaction au Canada. "Le gouvernement du Canada est en désaccord avec la décision du département du Commerce des Etats-Unis d'imposer des droits injustes et punitifs" sur les exportations de bois de construction, appelé bois d'œuvre au Canada, ont indiqué Chrystia Freeland et Jim Carr, respectivement ministres des Affaires étrangères et des Ressources naturelles. L'ensemble des importations de bois de construction canadien aux Etats-Unis se sont élevées en 2016 à 5,66 milliards de dollars, a précisé le ministère américain, mais tous les produits ne sont pas visés par les mesures annoncées lundi. Ce différend sur le bois de construction entre Washington et Ottawa a connu de nombreux rebondissements depuis près de 35 ans, les producteurs américains accusant leurs homologues canadiens d'en exporter aux Etats-Unis à prix de dumping, c'est à dire inférieur aux coûts de production. "Les accusations ne reposent sur absolument aucun fondement", a déploré le gouvernement de Justin Trudeau en promettant de défendre "vigoureusement les intérêts de l'industrie canadienne du bois d'oeuvre résineux, y compris en recourant aux tribunaux". Le Canada et les Etats-Unis, ainsi que le Mexique, sont liés par un accord de libre-échange, l'Aléna, mais le bois de construction avait fait l'objet d'un accord bilatéral conclu en 2006, qui a expiré à la fin 2015. Le président américain Donald Trump, qui a pris ses fonctions en janvier, a affirmé lors de la campagne présidentielle et depuis son élection qu'il voulait renégocier l'Aléna mais ses attaques visaient initialement essentiellement le Mexique. Depuis quelques jours toutefois, il s'en ai pris de manière virulente au Canada sur plusieurs sujets comme les produits laitiers et, maintenant, le bois de construction.
Mauvaise semaine Le secrétaire au Commerce américain Wilbur Ross a affirmé dans un communiqué que "cela a été une mauvaise semaine pour les relations commerciales américano-canadiennes. Lundi dernier, il est apparu que le Canada veut bloquer le dernier produit laitier exporté des Etats-Unis. Aujourd'hui, dans un dossier différent, le département du Commerce a déterminé qu'il y avait besoin d'imposer des droits compensateurs sur environ un milliard de dollars d'exportations canadiennes de bois de construction vers chez nous. Ce n'est pas notre idée d'un accord de libre-échange qui fonctionne bien", a-t-il affirmé. Le DoC va ordonner aux douanes américaines de prélever les taxes en liquide. Dans certains cas, cette mesure sera appliquée rétroactivement sur les exportations des 90 derniers jours. Après ces mesures d'urgence, le DoC va mener une enquête approfondie et confirmer, ou non, sa décision d'ici le 27 septembre. Celle-ci devra ensuite recevoir l'aval de la Commission américaine internationale pour le Commerce (USITC) pour être confirmée. M. Ross et les ministres canadiens ont indiqué lundi que les deux pays avaient tenté de trouver, en vain, un accord négocié. "Le Canada a présenté un certain nombre de propositions raisonnables à l'administration américaine actuelle" pour permettre aux constructeurs américains d'obtenir l'assurance "d'approvisionnement à des prix équitables", selon les ministres canadiens. "Nous restons confiants qu'un règlement négocié n'est pas seulement possible, mais dans l'intérêt des deux pays", ont-ils affirmé. M. Trump a ouvert plusieurs fronts sur le plan commercial, estimant que trop d'emplois industriels sont partis à l'étranger, notamment au Mexique, et que les Etats-Unis sont victimes de pratiques déloyales de leurs partenaires commerciaux. Il a notamment évoqué la semaine dernière de possibles sanctions dans le secteur de l'acier, estimant que la baisse de la production nationale du fait de la hausse des importations menaçait la sécurité nationale du pays.
Un droit de douane de 20% Les Etats-Unis vont imposer des droits de douane de 20% en moyenne sur des importations de bois d'œuvre en provenance du Canada, a déclaré lundi le secrétaire au Commerce Wilbur Ross, nouvelle étape dans un différend commercial de longue date entre les deux voisins. Les producteurs de bois américains avaient demandé au département du Commerce en novembre dernier, quand Barack Obama occupait encore la Maison blanche, de mener une enquête sur ce qui constitue à leurs yeux des subventions injustifiées accordées à leurs concurrents canadiens. Ces derniers se fournissent en bois auprès de terres appartenant à l'Etat canadien tandis que les producteurs américains, dans leur grande majorité, coupent des arbres qui ont poussé sur des terres privées. La mesure annoncée par Wilbur Ross, qui affectera quelque 5,66 milliards de dollars (5,21 milliards d'euros) de matériaux de construction importés, plante le décor d'une ré-négociation à venir de l'Accord de libre-échange nord-américain (Alena) conclu il y a 23 ans entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique. Le Canada a dénoncé les droits de douane - qui frappe le plus West Fraser Mills avec un taux de 24,12% et Canfor (20,26%) - et s'est engagé à défendre ses intérêts. L'annonce de ces droits entraînait, vers 02h40 GMT, une hausse de 0,42% du dollar américain face au dollar canadien. Wilbur Ross, qui a précisé que les droits de douane sur le bois canadien rapporteraient environ un milliard de dollars par an, a déclaré que le Canada "prenait déjà des mesures de rétorsion" contre les Etats-Unis avec les restrictions imposées sur les importations américaines de produits de protéines laitières hautement filtrés, utilisés par les fabricants de fromage. La semaine dernière, le président américain Donald Trump a qualifié d'"injustes" les protections dont bénéficie l'industrie laitière canadienne. Fin mars, l'administration Trump a lancé jeudi le chantier de la réforme du traité de l'Alena en faisant parvenir au Congrès une liste préliminaire, plutôt limitée, de priorités pour sa renégociation. Cette renégociation devrait commencer cet été. Durant la campagne présidentielle américaine, Donald Trump s'était engagé à abroger l'Alena s'il n'était pas renégocié dans un sens plus favorable aux Etats-Unis.