Deux pétroliers ont été jeudi la cible d'attaques dans le golfe d'Oman, près du détroit d'Ormuz, laissant craindre une nouvelle confrontation entre l'Iran et les Etats-Unis, qui ont imputé ces actes à Téhéran. "Les Etats-Unis considèrent que la République islamique d'Iran est responsable des attaques survenues aujourd'hui dans le golfe d'Oman", a dit le chef du département d'Etat américain, Mike Pompeo, à la presse. "Cette conclusion s'appuie sur des renseignements, sur les armes utilisées, sur le niveau de savoir-faire nécessaire pour mener à bien l'opération, sur les attaques iraniennes analogues et récentes contre la marine marchande, et sur le fait qu'aucune organisation à la solde d'une puissance, dans la région, ne dispose des ressources et de l'efficacité requises pour passer à l'acte avec un tel degré de complexité", a continué Pompeo. Washington avait déjà accusé Téhéran d'être responsable d'une attaque analogue, le 12 mai, qui avait visé quatre pétroliers dans le même secteur, par où transite une partie conséquente des exportations pétrolières mondiales. L'Arabie saoudite a déclaré elle aussi penser, à l'instar de Mike Pompeo, que l'Iran était responsable des dernières attaques. "Nous n'avons pas de raison d'être en désaccord avec le secrétaire d'Etat. Nous sommes du même avis que lui", a estimé jeudi soir le chef de la diplomatie saoudienne, Adel al Djoubeïr. "L'Iran est coutumier de ce genre d'actes", a-t-il ajouté. L'Iran, qui a démenti catégoriquement être responsable des attaques du 12 mai, a averti ces derniers mois qu'il pourrait bloquer le détroit d'Ormuz s'il ne pouvait commercialiser son pétrole du fait des sanctions américaines. Les deux pétroliers visés jeudi, le Front Altair et le Kokuka Courageous, qui battent respectivement pavillon des îles Marshall et du Panama, ont été évacués et leurs équipages placés en sécurité. Une personne au fait du dossier a assuré jeudi à Reuters qu'aucune torpille n'avait été utilisée contre les deux pétroliers en question. L'équipage de l'un des pétroliers visés jeudi a abandonné le navire après avoir repéré ce qui semblait être une mine-ventouse fixée au bâtiment, a dit d'autre part un responsable américain à Reuters, sous le couvert de l'anonymat. Le propriétaire du Kokuka Courageous a indiqué que le navire avait été attaqué à deux reprises en l'espace de trois heures et qu'un incendie s'était déclaré dans la salle des machines. Son armateur, Bernhard Schulte Shipmanagement, a publié un communiqué indiquant que les 21 membres d'équipage avaient quitté le bâtiment à bord d'un canot de sauvetage avant d'être repêchés par le Costal Ace, un navire néerlandais, qui les a remis à la marine américaine.
Le pétrole en nette hausse à new york L'équipage du Front Altair était constitué de onze Russes, onze Philippins et un Géorgien. Ils ont été récupérés par un cargo, le Hyundai Dubai, avant d'être transbordés sur un navire iranien qui les a débarqués au port de Bandar Abbas. CPC, son armateur taiwanais, dit penser que le pétrolier, qui transportait 75.000 tonnes de naphte, a été touché par une torpille vers 04h00 GMT. Basée à Bahreïn, la Ve Flotte américaine a annoncé de son côté avoir reçu deux appels de détresse. "Nous sommes au courant de l'attaque de pétroliers en mer d'Oman. Les forces navales américaines de la région ont reçu deux appels de détresse distincts, l'un à 06h12 heure locale et l'autre à 07h00", a déclaré son porte-parole Joshua Frey. Un cinquième de la demande mondiale de pétrole transite par le détroit d'Ormuz, où quatre navires de commerce ont déjà été les cibles d'"actes de sabotage" à la mi-mai. Les incidents de jeudi ont provoqué une forte hausse des cours du brut, qui ont terminé en nette hausse sur le marché new-yorkais Nymex. Le contrat juin sur le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) CLc1 a gagné 1,14 dollar, soit 2,23%, à 52,28 dollars le baril. Il a pris en séance jusqu'à 4,5% pour monter à 53,45 dollars. Au moment de la clôture du Nymex, le Brent LCOc1 prenait 1,37 dollar (+2,28%) à 61,34 dollars, après un pic à 62,64 dollars en séance. "Je suis extrêmement préoccupé par la sécurité de nos équipages qui franchissent le détroit d'Ormuz", a commenté Paolo d'Amico, président d'Intertanko, une fédération de transporteurs pétroliers. "Il faut se rappeler que 30% de la flotte pétrolière mondiale passe par le détroit (d'Ormuz). Si les eaux cessent d'être sûres, c'est l'approvisionnement de tout le monde occidental qui est en péril", a-t-il encore déclaré. Les Etats-Unis ont informé les membres du Conseil de sécurité que la question de la sécurité maritime dans la région serait abordée jeudi lors d'une réunion à huis clos. "Il est inacceptable que quiconque attaque des navires marchands et l'attaque d'aujourd'hui sur les bateau dans le golfe d'Oman soulève de nombreuses préoccupations", a déclaré Jonathan Cohen, ambassadeur américain aux Nations unies. De son côté, le secrétaire général de l'Onu, Antonio Guterres, a déclaré lors d'une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la coopération entre l'Onu et la Ligue arabe qu'"Il importe d'établir les faits et de déterminer les responsabilités". Le monde, a-t-il averti, ne peut se permettre "une confrontation majeure dans la région du Golfe".
Le marché pétrolier devrait s'équilibrer fin 2019 Le marché du pétrole devrait s'équilibrer vers la fin de l'année avec le recul des stocks mondiaux et le maintien d'une demande forte, a déclaré lundi à Reuters le ministre koweïtien du Pétrole. Il reste néanmoins des incertitudes concernant la croissance de la demande en raison des craintes de l'impact des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine sur l'économie mondiale, a dit Khaled al Fadhel, qui a évoqué également le fait que la production de pétrole de schiste aux Etats-Unis continuait d'augmenter. Ces perspectives incertaines font qu'il est difficile pour l'Opep et ses alliés d'avoir une vision claire de l'évolution de l'offre au second semestre, a dit le ministre, en réponse à des questions écrites. Dans ce contexte, il est trop tôt pour dire si les producteurs étendront au-delà du mois du juin leurs objectifs actuels en matière de pompages, a-t-il dit. L'Opep et ses alliés sont convenus en décembre de réduire l'offre de 1,2 million de barils par jour (bpj) à compter du 1er janvier 2019 et pour une durée de six mois afin de stabiliser le marché et de soutenir les cours. Sur ce total, l'effort demandé à l'Opep est de 800.000 bpj. "Il y a une grande inquiétude aujourd'hui dans le marché liée principalement aux craintes concernant l'offre", a déclaré Khaled al Fadhel. "Par exemple, l'impact de la décision annoncée récemment par le gouvernement américain de ne pas prolonger les exemptions accordés à de gros acheteurs de brut iranien ne se fait pas encore sentir." Le ministre a cité également les effets de possibles nouvelles sanctions américaines contre le Venezuela, les tensions politiques en Libye, la hausse de la production du pétrole de schiste aux Etats-Unis et l'impact du conflit commercial entre Washington et Pékin comme autant de raisons pour lesquelles les prévisions en matière d'offre et de demande mondiales étaient difficiles à établir. L'Opep et ses alliés ont fait des efforts remarquables dans l'application des accords de réduction de la production, a-t-il dit. "Mais nous avons encore du travail à faire. Je pense que le marché devrait s'équilibrer durant le second semestre 2019, vraisemblablement vers la fin de l'année."